Denis Diderot

Oral du bac de français, ecrit du bac de français, pour aller plus loin.

Denis Diderot

voyage de bougainville analyse

  • Aide aux devoirs

Analyse du Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot

Chapitre i, fin du dialogue entre a et b.

I) Le regard de l’autre

a) A donne à voir le point de vue des Européens

Le personnage A représente le point vu des Européens, face à ce que dit B qui représente le point de vue de Bougainville. A pense que B enjolive la réalité “ Est-ce que vous donneriez dans la fable de Tahiti ?”, tout ce qui est présenté comme étant plus beau que l’ancien monde n’est pas réel aux yeux de l'Européen qui demande des preuves “Et où trouve-t-on ce supplément ?”. A cherche des explications, il veut savoir toute la vérité : “Assurément je le veux”.

b) B montre l’incompréhension des Tahitiens

B montre l'incompréhension des Tahitiens, qui voient une Europe déraisonnable alors que tous les européens pensent qu’elle est merveilleuse. Le seul adjectif qu’emploie B pour caractériser l’Europe est “folle”. B amène une réflexion sur le langage, les tahitiens ont une culture tellement différente qu’ils n’ont pas les mots pour exprimer ce qui est trop différent d’eux : Aotourou est le reflet de sa civilisation “il ne trouvera dans sa langue aucun terme correspondant a celles dont il a quelques idées”. En effet, selon B les tahitiens ne voudront pas croire Aotourou : “Parce qu'en comparant leurs moeurs aux nôtres, ils aimeront mieux prendre Aotourou pour un menteur, que de nous croire si fous”.

c) La thèse de Diderot

Selon Diderot, il faudrait vivre en contact avec la nature et non dans l’artifice. L'Européen a l’art de tout compliquer afin de priver l’homme de sa liberté. Ainsi on voit clairement que Diderot exprime ses idées à travers le personnage de B qui aura le dernier mot.

II) La critique de la civilisation Européenne

a) Les oppositions entre la vie sauvage et les sociétés civilisées

La vie sauvage est selon B une vie facile, en connexion avec la nature par opposition à la vie Européenne faite d’entraves et de lois qui restreint la liberté des êtres humains de différentes manières : “les entraves déguisées sous cent formes diverses, entraves qui ne peuvent qu'exciter l'indignation et le mépris d'un être en qui le sentiment de la liberté est le plus profond des sentiments”. La société Européenne, contrairement à la vie Tahitienne est basée sur la modification et la maîtrise de ce que la nature a donné : “nos sociétés sont des machines si compliquées”.

b) Diderot montre que la civilisation européenne est sur le déclin

Diderot compare avec une métaphore l’ancien monde comme une personne qui “touche à sa vieillesse” et le nouveau monde comme un “enfant [...] à l’origine du monde”. Cette métaphore montre le contraste qu’il y a entre les deux mondes : l’ancien monde vit dans le développement et le progrès alors que le nouveau monde vit en connexion avec la Terre. 

c) La symbolique de la disparition du brouillard (disparition du dialogue lui-même, révélation des idées des Lumières)

A a finalement compris qu’il ne connaît pas toute la vérité au sujet des Tahitiens. Le brouillard est une métaphore de la disparition du dialogue : la discussion entre A et B est terminée.  Le brouillard qui retombe montre l’obscurantisme de A qui disparaît et son esprit qui s’ouvre sur les idées des lumières. “Assurément, je le veux, voilà le brouillard qui retombe, et l'azur du ciel qui commence à paraître. Il semble que mon lot soit d'avoir tort avec vous jusque dans les moindres choses ; il faut que je sois bien bon pour vous pardonner une supériorité aussi continue !”

Chapitre II, Les adieux du vieillard

I) Une condamnation de la colonisation et de l’esclavage

 1.  Un discours pathétique

 •  “Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voulez attaché à la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui-là, dans l'autre, vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices” : le vieillard continue son discours prophétique: il fait une description des Européens qui au retour tiendront un morceau de bois et une épée pour asservir les Tahitiens et les exploiter pour leurs vices. Diderot utilise des termes qui connotent la violence pour mettre l’emphase sur la nature cruelle et hypocrite des Européens.  

 •  “un jour vous servirez sous eux aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux”: Le vieillard décrit les Européens comme des personnes qui baignent dans le malheur et à cause de celui-ci ont recours à la violence.

 •  “Mais je me console ; je touche à la fin de ma carrière ; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point.”: le vieillard se sent soulagé parce qu’il ne verra pas les horreurs des Européens à cause de son âge avancé.

 •  “Tahitiens ! ô mes amis ! vous auriez un moyen d'échapper à un funeste avenir ; mais j'aimerais mieux mourir que de vous avoir donner le conseil. Qu'ils s'éloignent, et qu'ils vivent." : Pour soutenir son argumentation dans son discours, le vieillard interpelle deux fois les habitants de Tahiti. Une première fois il les appelle par leur nationalité, puis il utilise l’apostrophe,  le vocatif et le terme d'amitié pour garder leur attention. Le vieillard précise que les Tahitiens ont un seul moyen d'échapper  à leur funeste avenir qui est de chasser les Européens de leur pays.

 2.  Le vieillard, un porte-parole des Lumières  

 •  «ce vieillard s'avança d'un air sévère, et dit :"Pleurez, malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ceci soit de l'arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants : un jour, vous les connaîtrez mieux”»: Diderot utilise un personnage vieux qui représente la sagesse pour faire passer un message prophétique. Le vieillard commence son discours en disant que les Européens vont revenir pour coloniser la Polynésie.

 •  “Qu'ils s'éloignent, et qu'ils vivent." : Utilisation du subjonctif pour évoquer son souhait de les voir partir et puisqu’il incarne la philosophie des Lumières, le vieillard bénit les Européens.    

 •  “Puis s'adressant à Bougainville, il ajouta : "Et toi, chef des brigands qui t'obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive : nous sommes innocents, nous sommes heureux ”: Le vieillard utilise l'impératif pour prendre autorité comme chef du village. Il indique que les tahitiens sont innocents et heureux sans eux.   

 •  « et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tenté d'effacer de nos âmes son caractère» : le vieillard précise que les européens sont nocif aux Tahitiens. Il ajoute aussi, que leur mode de vie est rythmé par la nature et que les Européens ont voulu l’effacer de leurs gênes ( caractère génétique).

 II) Un éloge de la vie sauvage par opposition au mode de vie des européens

 1.  L’éloge de la vie sauvage

 •  “Au départ de Bougainville, lorsque les habitants accouraient en foule sur le rivage, s'attachaient à ses vêtements, serraient ses camarades entre leurs bras, et pleuraient, ce vieillard s'avança d'un air sévère”:  Diderot décrit le comportement des sauvages de Tahiti lors du débarquement de Bougainville. D'après le narrateur, les tahitiens se comportent dans la joie. Ils touchent les vêtements des Européens pour les découvrir mais pas pour les leur arracher. Ils serraient leurs camarades dans leurs bras. Diderot fait une description du comportement presque enfantin des Tahitiens.  

 •  “Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagé ce privilège avec nous” : Diderot fait un éloge sur la vie tahitienne où la polygamie maintient une harmonie. Montre une égalité entre les hommes et les femmes.  

 2.  La condamnation du mode de vie européen

 •  “Puis s'adressant à Bougainville, il ajouta : "Et toi, chef des brigands qui t'obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive : nous sommes innocents, nous sommes heureux”: Le vieillard continue son discours en s’adressant à Bougainville, il caractérise les européens comme des brigands ( ils voleront leurs richesses).

 •  “Ici tout est à tous ; et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien”: Le vieillard précise que la notion de propriété n’existe pas chez les tahitiens.  

 •  “et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu féroce entre les leurs.”: Le vieillard critique les actions des européens qui ont rendu les femmes jalouses, un sentiment qu’elles ignoraient.

Chapitre III, L’entretien de l’aumônier et d’Orou

I ) Le regard du Tahitien 

1) La remise en cause de la religion

Le point  de vue, dans le Supplément au voyage de Bougainville, est celui d’un tahitien fictif. Ce point de vue étranger permet à Diderot de faire passer ses idées en se protégeant de la censure. L’expression du doute à travers les questions rhétoriques (“Sur quoi ce droit serait-il fondé ?”, “qui se plaint et qui souffre ; et qui ne saurait devenir un effet de commerce, sans qu’on oublie son caractère, et qu’on fasse violence à la nature ?, “ Peuvent-ils faire que ce qui est juste soit injuste, et que ce qui est injuste soit juste ?” ) permet au narrateur de remettre en cause la religion.

2) Le concept de Dieu perçu comme contradictoire

Le personnage d’Orou définit Dieu par la périphrase “vieil ouvrier” qui est un terme utilisé par les philosophes des Lumières qui sont déistes : “Je ne sais ce que c’est que ton grand ouvrier”. Les énumérations et les antithèses définissent Dieu comme une entité capable de tout mais qui ne sert à rien: “qui commande et qui n’est pas obéi ; qui peut empêcher, et qui n’empêche pas.” Ainsi, le concept de Dieu est perçu par le tahitien comme contradictoire.

3) La souveraineté de la nature

Les nombreuses antithèses montrent que pour le personnage d’Orou, les lois humaines sont contraires à la nature : “Rien, en effet, te paraît-il plus insensé qu’un précepte qui proscrit le changement qui est en nous ; qui commande une constance qui n’y peut être, et qui viole la liberté du mâle et de la femelle, en les enchaînant pour jamais l’un à l’autre”. Cependant, on pourrait lui opposer l’argument que de nombreux oiseaux vivent en couple et sont fidèles l’un à l’autre pour une saison (les chouettes, les canards) ou pour toute la durée de leur vie (les cygnes, les inséparables, de nombreux perroquets et perruches…).

L’usage de la périphrase “souveraine maîtresse” pour qualifier la nature montre que pour les tahitiens la nature devrait être la seule règle à suivre.

II) Un discours digne d’un philosophe des Lumières

1) Les étapes du raisonnement du Tahitien

Le raisonnement du Tahitien se décompose en trois étapes distinctes. Premièrement, il constate que les actions des Européens sont déraisonnables car contraires à la nature : “je les trouve opposés à la nature, et contraires à la raison”.

Ensuite, il s’interroge sur la capacité des hommes à prendre des bonnes décisions : “qui se plaint et qui souffre ; et qui ne saurait devenir un effet de commerce, sans qu’on oublie son caractère, et qu’on fasse violence à la nature ?” Le Tahitien pense à la fois à l’harmonie sociale et au bonheur individuel qui passent par l’assouvissement des besoins et désirs essentiels à la vie, et que les Européens ne cessent de contrarier et de contraindre en assignant une dimension morale à des actes naturels qui n’en comportent pas selon lui, telles les relations intimes. Enfin, il affirme que l’homme doit garder son libre arbitre et rester maître de lui-même : “Il n’y a point de bonté qu’on ne pût t’interdire ; point de méchanceté qu’on ne pût t’ordonner.”

2) Le portrait de l’homme civilisé

Le portrait de l’homme civilisé que fait le Tahitien est péjoratif. Selon lui, les Européens ne sont pas raisonnables et oeuvre pour leur propre malheur en éditant des lois qui sont contraire à la nature : “Contraires à la nature, parce qu’ils supposent qu’un être pensant, sentant et libre, peut être la propriété d’un être semblable à lui.” Ses actes déraisonnables sont responsables de conflits causés par la jalousie engendrée par la propriété.

3) Orou un philosophe des Lumières 

Le personnage d’Orou est le porte-parole de Diderot car son discours est digne d’un philosophe des Lumières. En effet, nous observons un discours très structuré avec plusieurs étapes logiques dans son argumentation. Il mène une réflexion métaphysique au sujet de Dieu : “fâcher à tout moment le vieil ouvrier, qui a tout fait sans mains, sans tête et sans outils ; qui est partout, et qu’on ne voit nulle part”. Ses arguments portent aussi une réflexion philosophique sur le bonheur et la morale : “sont-ils maîtres du bien et du mal ?” Ce discours est mené par un personnage sans éducation, ce qui est paradoxal voire invraisemblable. C’est pourquoi on peut affirmer que le récit du voyage à Tahiti énoncé dans le Supplément au voyage de Bougainville est une utopie, c’est-à-dire un récit fictif construit dans le but d’agir comme un miroir pour le lecteur qui va le comparer à la société à travers il vit.

III) Une société qui dénature l’homme

1) La nature est sous le signe du mouvement

La fidélité et le mariage sont des signes d’emprisonnement pour Orou. Selon lui, ils nous privent de liberté en nous enchaînant à un partenaire. Or la nature est en perpétuel mouvement : “Rien, en effet, te paraît-il plus insensé qu’un précepte qui proscrit le changement qui est en nous ; qui commande une constance qui n’y peut être”. La nature est synonyme de liberté.

2) Orou invite à dissocier les actions des valeurs morales qui leur sont associées

Orou invite à dissocier les actions des valeurs morales qui leur sont associées car autrement les valeurs morales seraient fluctuantes et soumises au bon vouloir d’hommes puissants chargés de régler la conduite de tous les autres : “dépend-il d’eux d’attacher le bien à des actions nuisibles, et le mal à des actions innocentes ou utiles ? Tu ne saurais le penser, car, à ce compte, il n’y aurait ni vrai ni faux, ni bon ni mauvais, ni beau ni laid”.

3) Les lois européennes empêchent l’homme d’être heureux

Les lois européennes empêchent l’homme d’être heureux car elles provoquent de la confusion et sont souvent impossibles à mettre en oeuvre ou à respecter : “Et où en serais-tu réduit, si tes trois maîtres, peu d’accord entre eux, s’avisaient de te permettre, de t’enjoindre et de te défendre la même chose, comme je pense qu’il arrive souvent ?”

Chapitre III, Polly Baker

Introduction :

Les femmes ont dû se battre pour obtenir l'égalité des sexes qui est encore aujourd'hui un grand sujet de débat. Ainsi dans ce texte écrit par Diderot un philosophe des lumières le personnage de Polly Baker se bat pour faire entendre sa voix. En quoi ce texte défend-il les droits des femmes face à l’oppression masculine ? Nous étudierons en un premier temps le discours efficace de Polly et en un second temps le discours émouvant. 

I) Un discours efficace

a) Les deux statuts de la femme dans la société

Au XVIIIème siècle, la femme pouvait avoir deux conditions de vies. La première est quand elle est mariée, elle est considérée comme une femme honnête ayant tout les droits : “deux jours après il épousa Miss Baker, et fit une honnête femme”. Mais elle peut être aussi maltraitée à condition qu'elle aie eu un rapport avant le mariage et donc est considérée comme une femme publique. À ce moment là, elle est battue ou doit payer une amende jusqu'à la ruiner : “La loi condamne toutes les personnes du sexe qui ne doivent le titre de mère qu’au libertinage à une amende, ou à une punition corporelle”.

b) L’ironie

Polly utilise beaucoup de question rhétorique pour mieux se faire entendre sans trop de jugement. Elle essaye de retourner la situation pour que les magistrats se sentent mal à l'aise suite à ça :”vous m’avez déjà exclue de la communion de l’église, cela ne suffit-il pas ?”. 

Elle utilise également l'ironie pour leur faire comprendre qu’ils devraient plutôt l’admirer comme une héroïne puisqu’elle a réussi à élever ses 5 enfants seule sans un sou avec ce titre de femme publique : “j’ai peine à croire que ce me soit un grand crime d’avoir donné le jour à de beaux enfants que Dieu a doués d’âmes immortelles et qui l’adorent”. 

De plus, par une ironie du sort, l'homme qui a causé ses malheurs et son déshonneur est un magistrat, donc il incarne la loi et devrait être irréprochable : “Cet homme, vous le connaissez tous : il est actuellement magistrat comme vous et s’assied à vos côtés”.

II) Un discours émouvant

a) Une femme polie et douce

Pour commencer et achever son discours, Polly Baker utilise des formules de politesse pour qu'elle soit écouté: “Permettez moi, Messieurs”, “Pardonnez, Messieurs,”.

Polly Baker utilise la gentillesse et non l'agressivité pour essayer de convaincre les juges. Elle ne leur demande pas leur Clémence mais tente de se faire plaindre si le supplice arrivait :”ce que j’ose espérer, c’est que vous daignerez implorer pour moi les bontés du gouvernement et obtenir qu’il me dispense de l’amende.” 

b) Le registre pathétique

Dans ce texte le registre pathétique est très présent : “qu’il aurait intéressé votre pitié en ma faveur, en faveur d’une malheureuse”. Par ce biais, Polly espère susciter la pitié des juges. D'ailleurs, elle se plaint beaucoup de cet homme qui est magistrat comme eux et qui a détruit sa vie en lui faisant perdre sa virginité avant le mariage qu’il lui avait promis sans tenir sa parole. Elle essaye de leur montrer qu'elle n'y est pour rien et en même temps elle leur demande d’être cléments : “Mais est-ce ma faute ?”, “Ce sont eux qui troublent la tranquillité publique ; voilà des crimes qui méritent plus que le mien l’animadversion des lois.”

Conclusion :

Ainsi, le discours de Polly Baker est efficace car elle réussit à s’attirer la clémence des juges et à obtenir le mariage de l’homme qui l’avait perdue : “deux jours après il épousa Miss Baker, et fit une honnête femme de celle dont cinq ans auparavant il avait fait une fille publique.” Ce discours a une portée universelle car il défend la position de la femme face à l'homme qui, à cette époque, exerce sur elle un pouvoir absolu.

Chapitre V, Fin du dialogue entre A et B

I) La leçon finale

B répond aux interrogations de A en lui donnant une leçon. L'échange n'est pas équilibré puisque B parle beaucoup plus que A. B parle en utilisant des maximes comme par exemple : « Il y a moins d'un inconvénient à être fou avec des fous qu'à être sage tout seul. » Ou encore : «la honte, le châtiment et l'ignominie sont les plus grands de tous les maux ». La métaphore du brouillard qui était épais au début de la discussion entre A et B, mais qui se dissipe maintenant, indique que B en tant que philosophe des lumières, a éclairé A, dont l'esprit n'est maintenant plus embrouillé : « Et ce brouillard épais, qu'est-il devenu ? Il est retombé. » 

II) Une conclusion paradoxale

Le Supplément au voyage de Bougainville fait l'éloge d'une société primitive non corrompue qui s'oppose à la civilisation européenne dans laquelle les personnages fictifs A et B évoluent. C'est ce que l'on appelle le mythe du bon sauvage. Cependant on remarque que dans ce passage les principes défendus par B sont contraires à ce qu'il a valorisé dans tout le reste du livre. Par exemple après avoir fait l'éloge de la sincérité, il dit maintenant qu'il faut s'adapter à la situation : « Prendre le froc du pays où l'on va, et garder celui du pays où l'on est. » B en tant que philosophe des Lumières, fait preuve de pragmatisme et propose d'adopter des comportements qui visent à préserver l'harmonie de la société : « Et surtout être honnête et sincère jusqu'au scrupule avec des êtres fragiles qui ne peuvent faire notre bonheur sans renoncer aux avantages les plus précieux de nos sociétés. » B fait preuve de conservatisme en invitant au respect des lois existantes tant qu'on ne peut les changer alors qu'il a argumenté dans tout le reste du dialogue pour démontrer que celles-ci contrariaient la nature et rendaient l'homme malheureux.

III) Une leçon de philosophie

Le statut social de la femme et son rôle dans la société sont des thèmes centraux dans le Supplément au voyage de Bougainville : « Toujours les femmes ; on ne saurait faire un pas sans les rencontrer à travers son chemin. ». Diderot, en adoptant le point de vue des femmes, notamment dans l’épisode de Polly Baker, se positionne d'une manière extrêmement novatrice voire révolutionnaire. De plus, la réplique finale amusante pour le lecteur souligne la dimension ludique de ce texte. Le fait que le dialogue entre A et B encadre le récit sur Tahiti présente du coup celui-ci comme une utopie. Ainsi Diderot donne à son Supplément au voyage de Bougainville la double fonction d'instruire et de divertir son lecteur.

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  • Profil d'œuvre : Supplément au voyage de Bougainville

Supplément au voyage de Bougainville Profil d'œuvre

Supplément au voyage de Bougainville

Denis Diderot

Supplément au voyage de Bougainville de Diderot est un dialogue opposant deux façons de penser, de vivre. Les thèmes principaux sont le colonialisme et la vie sauvage. L'auteur compare l'homme civilisé orgueilleux et l'homme naturel libre. C'est quelques années après sa visite à Catherine II de Russie que Diderot écrit cet ouvrage. Il ne croit plus au despote éclairé. Le Supplément au voyage de Bougainville se veut une réponse fictive au récit de voyage de l'explorateur Bougainville qui avait découvert l'Océanie. Dans ce texte, Diderot donne la parole aux victimes de la colonisation. Ce sont ici les tahitiens. L'auteur inverse les regards pour dénoncer l'injustice. Il peut ainsi critiquer les sociétés occidentales. Ce long dialogue est perçu comme un réquisitoire critiquant Bougainville et, plus largement, l'Occident. Il fait aussi l'éloge de la vie sauvage, Diderot utilisant ainsi le mythe du bon sauvage inventé au siècle des Lumières.

Un réquisitoire

Le discours du tahitien, héros de l'ouvrage, est divisé en deux parties. La première partie est un réquisitoire critiquant Bougainville et la société occidentale. Diderot énumère les fautes de Bougainville et y oppose les mœurs des tahitiens. L'idée est développée que le mode de vie tahitien est meilleur que celui des européens. Les civilisés ne sont pas ceux que l'on croit. Les Occidentaux paraissent absurdes. La deuxième partie du texte sert de conclusion au discours du tahitien. Il résume tout ce qu'il a dit avant. Il demande à Bougainville et ses hommes de quitter Tahiti. Les moeurs des tahitiens ne sont pas moins bonnes que celles des européens. Elles sont différentes. Les Occidentaux apparaissent ici comme des sauvages.

Une critique de la société occidentale

La violence.

Chez les tahitiens, les femmes sont libres. Elles peuvent être avec la personne de leur choix. Bougainville en a profité, mais ensuite il demande aux femmes tahitiennes de respecter "sa" morale, et de n'être qu'avec un homme, comme en Europe. C'est alors que commence la violence, motivée par la jalousie. Sous couvert de morale, les Occidentaux ont apporté la haine.

Tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras, tu es devenu féroce entre les leurs. Elles ont commencé à se haïr, vous vous êtes égorgés pour elles; et elles nous sont revenues teintes de votre sang.

La propriété et l'esclavage

La notion de propriété a été introduite par les Occidentaux. Ce concept créé alors le concept même de vol. On ne peut voler que ce qui appartient à un autre. Bougainville applique sa vision des choses aux tahitiens. Il punit sévèrement le vol, alors que les tahitiens ne voient pas le mal à prendre quelque chose qui n'appartient à personne. Il fait aussi des tahitiens des esclaves. Il assujettit une population et s'approprie ses terres. Il veut dominer. Il parle de propriété mais finalement n'imagine pas une seconde qu'il prend la terre d'hommes qui vivaient là avant lui. Tout tourne autour des occidentaux, de leurs moeurs, de leurs idées.

Le "sauvage"

Diderot souligne plusieurs fois l'ethnocentrisme occidental. On comprend bien mieux pourquoi les tahitiens rejettent les coutumes européennes, puisqu'elles les oppriment. Ce qui paraît civilisé ne l'est plus. Les Occidentaux deviennent des sauvages. En effet, ils qualifient les tahitiens de sauvages mais ce sont eux qui sont barbares en instaurant l'esclavage. Ceux qui détiennent le savoir semblent être les tahitiens, qui sont plus sages, moins violents. C'est Diderot qui s'exprime à travers le narrateur tahitien, qui est un vieil homme. Son âge souligne sa sagesse.

L'éloge de la société tahïtienne

Diderot fait l'éloge de la société tahitienne, qui devient une société idéale. Ce peuple possède un mode de vie simple. Les choses essentielles pour les tahitiens sont le bonheur, l'innocence et la tranquillité. C'est la nature qui prime ici. La nature est synonyme de bien, de bonté. C'est le mythe du "bon sauvage". Les philosophes des Lumières pensent qu'une société qui reviendrait à la nature serait plus saine, plus juste. L'équilibre et la pureté de la culture tahitienne tiennent à son innocence et sa liberté. Elle n'est pas victime des carcans occidentaux.

Vous êtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ? Tu es venu ; nous sommes-nous jetés sur ta personne ? avons-nous pillé ton vaisseau ? t'avons-nous saisi et exposé aux flèches de nos ennemis ? t'avons-nous associé dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respecté notre image en toi. Laisse nous nos mœurs ; elles sont plus sages et plus honnêtes que les tiennes ; nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance, contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons.

Encyclopædia Universalis

SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE, Denis Diderot Fiche de lecture

  • 1. Une œuvre polyphonique
  • 2. Une utopie critique
  • 3. Bibliographie

La genèse et l' édition des œuvres de Diderot (1713-1784) sont souvent complexes et problématiques : comme le Paradoxe sur le comédien (conçu en 1769, publié en 1830), le Supplément au Voyage de Bougainville n'est à l' origine qu'un compte rendu de lecture destiné à La Correspondance littéraire de Grimm : une note sur le Voyage autour du monde (1771) que Bougainville rédigea à partir du Journal tenu lors de son voyage à Tahiti (6-15 avril 1768). Si dans un premier temps Grimm ne publie pas le texte de Diderot, une version remaniée du Supplément au Voyage de Bougainville paraît en feuilleton dans La Correspondance littéraire , en 1773 et 1774 ; mais la première édition en est posthume (1796), et il existe plusieurs versions manuscrites du texte, dont on publie désormais la plus longue. Inséparable de deux autres textes parus en 1798 dans un ordre concerté ( Ceci n'est pas un conte et Madame de la Carlière ), le Supplément au Voyage de Bougainville témoigne bien de la dimension de « création continuée » qui caractérise la pensée de Diderot. Elle va de pair avec le refus de tout dogmatisme et de toute réponse arrêtée dans la question centrale qui occupe le siècle des Lumières : celle de l'état de nature et de l'usage critique de cette notion.

Une œuvre polyphonique

Le Supplément au Voyage de Bougainville fait entendre plusieurs voix : les deux interlocuteurs, A et B, commentent, texte à l'appui, ce Voyage que B est en train de lire, et dont il prétend restituer l'intégralité, car les passages licencieux en auraient été supprimés. Cette fiction justifie le « supplément », terme défini par le Dictionnaire de Trévoux comme « ce qu'on ajoute à un auteur, pour remplir les lacunes qui se trouvaient dans ses ouvrages ». Suppléer consiste ici, pour Diderot, à commenter le Voyage de Bougainville sans laisser la parole à l'explorateur lui-même.

La version longue du texte comporte cinq parties, dont la première et la dernière, respectivement « Jugement du Voyage de Bougainville » et « Suite du dialogue entre A et B », encadrent d'autres discours rapportés : la prosopopée d'un vieux Tahitien (« Les Adieux du vieillard »), l'« Entretien de l'aumônier et d'Orou » (III) qui contient, en un nouvel enchâssement, l'histoire de Polly Baker et sa défense devant les juges rapportée au discours direct, enfin la suite de l'entretien de l'aumônier et d'Orou dans la section IV, non titrée. Pluralité des voix, mais aussi intertextualité assumée, voire exhibée par une activation du « principe dialogique » théorisé par Mikhaïl Bakhtine. Le Supplément fait aussi écho aux Dialogues de La Hontan avec un « sauvage de bon sens qui a voyagé » (1703), ou reprend l'histoire de Polly Baker à l' Histoire des deux Indes (1770), de l'abbé Raynal, à laquelle Diderot a contribué. Participent également de cette polyphonie le glissement d'un plan de l'énonciation à un autre, comme lorsque A s'adresse fictivement à Aotourou, le Tahitien que Bougainville a ramené en France et promené dans les salons parisiens : « O Aotourou, que tu seras content de revoir ton père, ta mère, tes frères, tes sœurs, tes compatriotes ! Que leur diras-tu de nous ? ». Mêlant lyrisme et ironie, Diderot met en scène un débat philosophique, dont les termes sont clairement résumés par A au terme du dialogue : « Reviendrons-nous à la nature ? Nous soumettrons-nous aux lois ? » B donne sa réponse, celle d'une adaptation à un état de fait – « Prendre le froc du pays où l'on va, et garder celui du pays où l'on est » – qui, si elle n'est pas sans évoquer la fin du Paradoxe sur le comédien et sa morale courtisane, n'est peut-être pas exactement celle de Diderot.

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  • Anouchka VASAK : ancienne élève de l'École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses, maître de conférences à l'université de Poitiers

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Anouchka VASAK. SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE, Denis Diderot - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis . Disponible sur : (consulté le )

VASAK, A.. SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE, Denis Diderot - Fiche de lecture . Encyclopædia Universalis . (consulté le )

VASAK, Anouchka. «  SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE, Denis Diderot - Fiche de lecture  ». Encyclopædia Universalis . Consulté le .

VASAK, Anouchka. «  SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE, Denis Diderot - Fiche de lecture  ». Encyclopædia Universalis [en ligne], (consulté le )

Autres références

CULTURE - Nature et culture

  • Écrit par Françoise ARMENGAUD

RÉCIT DE VOYAGE

  • Écrit par Jean ROUDAUT

FRANÇAISE LITTÉRATURE, XVIII e s.

  • Écrit par Pierre FRANTZ
  • LES LETTRES PERSANES, Montesquieu  - Le regard éloigné
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Supplément au voyage de Bougainville, Denis Diderot

Ce dialogue philosophique n’a été publié qu’après la mort de Diderot et se présente, ainsi que l’indique son titre, comme une suite au Voyage autour du monde écrit par l’explorateur Bougainville. Ce Voyage , paru en 1771, décrit les contrées lointaines encore inconnues des Européens. Son analyse de la société tahitienne, si différente du vieux monde, avait frappé ses contemporains. La découverte de nouvelles civilisations et de nouvelles cultures est le point de départ de la réflexion morale de Diderot.

Le Supplément est un dialogue entre deux personnages, A et B. On retrouve ici la forme du dialogue, que Diderot avait déjà expérimenté dans Le Neveu de Rameau , et qui permet d’allier une écriture rapide et légère à une réflexion philosophique.

Denis Diderot

Dialogue philosophique

Personnages

B : Lecteur de Bougainville.

A : Ami de B auquel il raconte le voyage de Bougainville.

Orou : Sage otaïtien, porteur d’une tradition, il est conscient des dangers que représentent les Européens pour sa civilisation.

L’aumônier : Religieux européen, il est fait de contradictions qui trouveront peut-être leur résolution en Otaïti.

L’opposition entre deux sociétés : Le grand intérêt de ce texte est de proposer une comparaison entre la société dite civilisée et une société prétendument sauvage. Diderot reprend une réflexion entamée par Montaigne qui renverse la hiérarchie des valeurs proposée par l’Occident. Grâce au déplacement du voyage, ce n’est plus l’otaïtien qui représente la nouveauté curieuse et intrigante, mais au contraire l’européen, sous les traits de l’aumônier qui est une source d’étonnement pour les autochtones. Grâce à ce déplacement, la société dans laquelle vit le lecteur et qui lui a probablement toujours semblé aller de soi lui apparaît sous un angle nouveau et étranger. Sont alors pointées les incohérences et les contradictions des civilisations européennes.

La morale et la politique : Au-delà de ce comparatisme culturel, Diderot élabore une réflexion philosophique portant sur la morale et sur la politique. L’une des grandes questions soulevées par ce texte porte sur l’étendue de la morale : est-elle relative ou universelle ? Le bien et le mal sont-ils des valeurs purement culturelles ? Il cherche également ce qui constitue le fondement d’une société et sur quelles lois naturelles s’ancre une communauté politique.

Le dialogue : La forme de ce dialogue est aussi riche que la réflexion qu’elle porte. Les deux interlocuteurs du début laissent place à deux autres personnages, l’aumônier et Orou, dans un jeu de récits enchâssés et croisés. Ce double jeu de dialogue relance l’autre dialogue, celui que Diderot tisse avec le livre de Bougainville.

Chapitre I - Jugement du voyage de Bougainville

Au cours d’une discussion, A et B évoquent le livre de Bougainville que B est en train de lire. A n’a pas lu cet ouvrage que B lui décrit. Il raconte ainsi le voyage de Bougainville, il parle d’Aotourou, un otaïtien qui accompagna Bougainville jusqu’à Paris, et de la « vie sauvage » des Otaïtiens que B compare aux mœurs européennes, si différentes.

B propose ensuite à A de lire un passage du Voyage concernant l’adieu que fit le chef d’une île aux voyageurs.

Chapitre II - Les adieux du vieillard

À l’arrivée des Européens, ce vieillard s’était enfermé chez lui. Lorsque ceux-ci s’en vont, le vieillard tient un discours dans lequel il déclare qu’il faut se lamenter lorsqu’ils arrivent et non lorsqu’ils partent. Il reproche à Bougainville d’avoir introduit les vices européens chez eux, dévalorise la prétendue civilisation européenne et souhaite aux navires de couler.

Chapitre III - Entretien de l’aumônier et d’Orou

L’otaïtien Orou loge un aumônier. Après le repas, Orou propose à l’aumônier de choisir entre sa femme et ses trois filles afin que l’une d’entre elles devienne mère. L’aumônier refuse à cause de sa religion. S’en suit une discussion sur les rapports entre les hommes et les femmes dans la société otaïtienne, ainsi que sur la religion. Orou ne comprend pas les Européens, qui sont censés obéir à l’État et à Dieu, mais qui ne sont pas punis lorsqu’ils ne le font pas.

La conversation retourne à A et B qui parlent de miss Polly Baker, une femme qui a été de nombreuses fois enceinte sans être mariée. Elle a échappé à la punition prévue en renvoyant la culpabilité sur les hommes.

Chapitre IV - Suite de l’entretien de l’aumônier et d’Orou

L’aumônier et Orou poursuivent la comparaison de leurs cultures respectives. Il est notamment question d’inceste, d’adultère, de l’importance des enfants, de l’argent, des religieux. Orou ne comprend pas les obligations qui lient les moines.

L’aumônier finit par céder à la tentation que représentent les filles et la femme d’Orou.

Chapitre V - Suite du dialogue entre A et B

À leur tour, A et B comparent les sociétés d’Europe et d’Otaïti. Ils se rendent compte que beaucoup des principes auxquels ils tiennent ne sont pas naturels mais acquis. Il leur semble que l’homme sauvage est davantage dans le juste que l’homme civilisé : il faudrait en effet se rapprocher davantage des lois de la nature.

« A – Cette superbe voûte étoilée sous laquelle nous revînmes hier et qui semblait nous garantir un beau jour, ne nous a pas tenu parole. B – Qu’en savez-vous ? A – Le brouillard est si épais qu’il nous dérobe la vue des arbres voisins. B – Il est vrai ; mais si ce brouillard qui ne reste dans la partie inférieure de l’atmosphère que parce qu’elle est suffisamment chargée d’humidité, retombe sur la terre ? A – Mais si au contraire il traverse l’éponge, s’élève et gagne la région supérieure où l’air est moins dense et peut, comme disent les chimistes, n’être pas saturé ? B – Il faut attendre. A – En attendant, que faites-vous ? B – Je lis. A – Toujours ce voyage de Bougainville ? B – Toujours. »

« OROU – Mais dis-moi donc pourquoi tu n’es pas vêtu comme les autres ? Que signifie cette casaque longue qui t’enveloppe de la tête aux pieds et ce sac pointu que tu laisses tomber sur tes épaules ou que tu ramènes sur tes oreilles ? L’AUMÔNIER – C’est quel tel que tu me vois, je me suis engagé dans une société d’hommes qu’on appelle dans mon pays des moines. Le plus sacré de leurs vœux est de n’approcher d’aucune femme et de ne point faire d’enfants. OROU – Que faites-vous donc ? L’AUMÔNIER – Rien. OROU – Et ton magistrat souffre cette espèce de paresseux, la pire de toutes ? L’AUMÔNIER – Il fait plus, il la respecte et la fait respecter. »

« Veux-tu savoir en tout temps et en tout lieu ce qui est bon et mauvais ? Attache-toi à la nature des choses et des actions, à tes rapports avec ton semblable, à l’influence de ta conduite sur ton utilité particulière et le bien général. »

« Je ne sais quels sont ces personnages que tu appelles magistrats et prêtres, dont l’autorité règle votre conduite ; mais, dis-moi, sont-ils maîtres du bien et du mal ? Peuvent-ils faire que ce qui est juste soit injuste, et que ce qui est injuste soit juste ? Dépend-il d’eux d’attacher le bien à des actions nuisibles et le mal à des actions innocentes ou utiles ? Tu ne saurais le penser, car à ce compte il n’y aurait ni vrai ni faux, ni bon ni mauvais, ni beau ni laid, du moins que ce qu’il plairait à ton grand ouvrier, à tes magistrats, à tes prêtres. »

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philofrançais.fr

"passe ton bac d'abord ", d. diderot, supplément au voyage de bougainville, 1772.

Biographie de Diderot

Ecrivain et philosophe, Diderot (1713-1784) est une grande figure du mouvement des Lumières. Maitre d’œuvre  avec d’Alembert de l’Encyclopédie (rédigée entre 1751 et 1772) Diderot sera toute sa vie confronté à la censure et devra s’exiler pour continuer à publier ses œuvres. Il s’est essayé à peu près à tous les genres : roman, théâtre, critique d’art et bien sûr dialogue philosophique.

Le Supplément au voyage de Bougainville :

En 1771, Bougainville, grand explorateur Français, avait publié Voyage autour du monde dans lequel il relatait son voyage à Tahiti et dans les régions avoisinantes.(Voir texte n°2) Cet ouvrage provoqua un grand engouement des Français pour Tahiti. Diderot voulut apporter un regard critique à la découverte de Bougainville et publia en 1772 un Supplément au voyage de Bougainville dans lequel il fait entendre un autre discours, celui d’un indigène, un chef tahitien qui s’adresse directement à Bougainville.

Analyse du texte

Diderot, Supplément au voyage de Bougainville

Laisse-nous nos moeurs, elles sont plus sages et plus honnêtes que les tiennes. Nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris parce que nous n’avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos cabanes, qu’y manque-t-il à ton avis ? Poursuis jusqu’où tu voudras ce que tu appelles commodités de la vie, mais permets à des êtres sensés de s’arrêter, lorsqu’ils n’auraient à obtenir de la continuité de leurs pénibles efforts que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l’étroite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler, quand jouirons- nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journalières la moindre qu’il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au repos. Va dans ta contrée t’agiter, te tourmenter tant que tu voudras. Laisse-nous reposer ; ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques. 

Les Cours Julien

Méthodologie et commentaires de textes littéraires

  • Préparation estivale

Poésie actualité: Nadal, le dernier combat d’un géant.

Mot du jour: écheveau., les mots à la mode: clash., mot du jour: tabellion., le discours du vieillard, supplément au voyage de bougainville, chapitre 2, diderot, 1796, commentaire, analyse..

Contact: [email protected]

Supplément au voyage de Bougainville, « le discours du vieillard », Diderot, 1796

« Pleurez, malheureux Tahitiens! pleurez; mais que ce soit de l’arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants: un jour, vous les connaîtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attaché à la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui-là, dans l’autre, vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu’eux. Mais je me console; je touche à la fin de ma carrière; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. O Tahitiens! mes amis! vous auriez un moyen d’échapper à un funeste avenir; mais j’aimerais mieux mourir que de vous en donner le conseil. Qu’ils s’éloignent, et qu’ils vivent. » Puis s’adressant à Bougainville, il ajouta: « Et toi, chef des brigands qui t’obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive: nous sommes innocents, nous sommes heureux; et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature; et tu as tenté d’effacer de nos âmes son caractère. Ici tout est à tous; et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes; tu as partagé ce privilège avec nous; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras; tu es devenu féroce entre les leurs. Elles ont commencé à se haïr; vous vous êtes égorgés pour elles; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres; et voilà que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n’es ni un dieu, ni un démon: qui es-tu donc, pour faire des esclaves? Orou! toi qui entends la langue de ces hommes-là, dis-nous à tous, comme tu me l’as dit à moi, ce qu’ils ont écrit sur cette lame de métal: Ce pays est à nous. Ce pays est à toi! et pourquoi? parce que tu y as mis le pied? Si un Tahitien débarquait un jour sur vos côtes, et qu’il gravât sur une de vos pierres ou sur l’écorce d’un de vos arbres: Ce pays appartient aux habitants de Tahiti, qu’en penserais-tu?… Tu n’es pas esclave: tu souffrirais la mort plutôt que de l’être, et tu veux nous asservir! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas défendre sa liberté et mourir? Celui dont tu veux t’emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frère. Vous êtes deux enfants de la nature; quel droit as-tu sur lui qu’il n’ait pas sur toi? Tu es venu; nous sommes-nous jetés sur ta personne? avons-nous pillé ton vaisseau? t’avons-nous saisi et exposé aux flèches de nos ennemis? t’avons-nous associé dans nos champs au travail de nos animaux? Nous avons respecté notre image en toi. « Laisse nous nos moeurs; elles sont plus sages et honnêtes que les tiennes; nous ne voulons plus troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris, parce que nous n’avons pas su nous faire des besoins superflus? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos cabanes, qu’y manque-t-il, à ton avis? Poursuis jusqu’où tu voudras ce que tu appelles les commodités de la vie; mais permets à des êtres sensés de s’arrêter, lorsqu’ils n’auraient à obtenir, de la continuité de leurs pénibles efforts, que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l’étroite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler? Quand jouirons-nous? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journalières la moindre qu’il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au repos. Va dans ta contrée t’agiter, te tourmenter tant que tu voudras; laisse-nous reposer: ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques. »

Exemple d’un plan de commentaire avec introduction et conclusion du passage « le discours du vieillard » dans supplément au voyage de Bougainville de Diderot, 1796.

(Ceci n’est pas un modèle, mais un exemple. Votre réflexion personnelle peut évidemment mener à d’autres pistes de lecture)

Introduction :

La parution du livre est posthume en 1796. Diderot a entrepris l’écriture du Supplément au voyage de Bougainville suite au succès du réel récit de voyage de l’explorateur, Voyage autour du monde (1771). Le livre, comme l’indique le titre complet, se présente sous la forme d’un dialogue entre deux personnages (A et B), qui se réfère à l’oeuvre de Bougainville pour mieux interroger le lecteur sur la colonisation et la vision européenne portée sur ces terres éloignées. (accroche avec remise dans le contexte)

A l’intérieur de ce dialogue philosophique, fréquent dans l’oeuvre du philosophe ( Entretien avec la Maréchale de… , ou Jacques le faliste ), deux récits sont enchâssés : l’entretien de l’aumonier et Orou, et les adieux du vieillard. Ce dernier se situe au début, dans le deuxième chapitre. Un vieil homme, respecté pour sa sagesse, et semblant être le chef de la tribut des Otaïtiens, détaille avec colère les méfaits des colons, et l’injustice de la colonisation dans un long discours. (présentation du texte)

Quel regard est porté sur la civilisation européenne dans cet extrait par le philosophe ? (problématique)

Nous montrerons dans un premier temps que ce texte est un discours argumentatif, puis nous analyserons la portée philosophique du propos, notamment dans la comparaison effectuée entre les deux mondes. (annonce de plan)

(introduction en quatre parties avec une accroche, une présentation du passage, une problématique, et une annonce de plan).

I- Un discours polémique.

(phrase d’introduction avec rappel du thème lors de la rédaction)

a) Les marques du discours.

  • s’adresse directement à Bougainville  : « Puis s’adressant à Bougainville ». Seconde personne du singulier tout au long du texte : « Et toi », « tu ne peux »…, marque d’un manque de respect pour le colonisateur.
  • il p arle au nom de son peuple « Nous suivons », et à son peuple, qui avec Bougainville, constitue son auditoire .
  • Présence de procédés oratoires comme de multiples questions rhétoriques .

b) Une tonalité polémique.

  • le vieillard ne débat pas avec Bougainville. Il est énervé  : ponctuation expressive  : « et tu veux nous asservir ! », impératif « Laisse-nous ».
  • formulations insultantes à plusieurs reprises  : « chef des brigands », « brute ».
  • colère du vieillard devant les comportements des Occidentaux décrits en termes violents : « féroce », « vous vous êtes égorgés pour elles ».

c) Un discours argumentatif.

  • un discours structuré malgré la colère  : tout d’abord, la situation initiale , le vaisseau proche de la rive. Ensuite, seconde étape sur la propriété « Ici tout est à tous », puis la liberté « Nous sommes libres », enfin, le second paragraphe expose plus en détail le mode de vie des Thaitiens, « tu es entré dans nos cabanes ».
  • utilisation d’un présent de vérité générale, qui ne souffre pas de contestation  : « Tu n’es ni un dieu, ni un démon », « Tout ce qui est nécessaire et bon, nous le possédons ».
  • connecteurs logiques  : « et » (répétitions dans le texte », « donc », « Lorsque »..
  • convaincre par l’exemple, et la logique du raisonnement, persuader par la tonalité polémique.

(phrase de conclusion/transition lors de la rédaction de la partie)

II- Un discours des Lumières.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

a) Un blâme de la colonisation.

  • description péjorative de la colonisation.
  • Un vol  : « Ce pays est à nous. Ce pays est à toi ! Et pourquoi ? Parce que tu y as mis le pied ? ». La colonisation est montrée comme une appropriation illégitime, faite par la violence, par la force.
  • La violence  : « vous enchaîne, vous égorge », mise en avant du symbole de la supériorité guerrière des Européens « le fer qui pend au côté de celui-là », « cette lame de métal », l’épée.
  • La privation de liberté  : « le titre de notre futur esclavage », « esclaves », « tu veux nous asservir », « défendre nitre liberté ».
  • un vol violent et un asservissement pour des buts néfastes  : « vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices », « aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu’eux », énumération insistant sur le caractère nocif de la civilisation européenne .

b) L’utopie tahitienne.

  • principe de tolérance en mettant en avant les caractéristiques de la civilisation thaïtienne.
  • Présent de vérité générale pour décrire leur état, leur vie : « Nous sommes innocents, nous sommes heureux », « Nous sommes libres ». Bonheur et liberté sont acquis. Le « nous » inclus tous les habitants ; société égalitaire .
  • Pas de besoins, apparence d’une société sans manques  : « Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons ».
  • pas de propriété  : « Ici, tout est à tous. », pas de mariage « Nos femmes et nos filles sont nous sont communes ». Idée d’une communauté utopique.

c) Une vision typique de Diderot.

  • matérialisme athée de Diderot mis en avant  : pas de liens familiaux sacrés, insistance sur les conditions de vie, refus de la propriété.
  • Vie et bonheur qui suivent les lois naturelles  : « Nous suivons le pur instinct de la nature », parallélismes simples pour exprimer une vie simple « Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger… ».
  • Travail et progrès sont vues comme des valeurs négatives  : « rien ne nous parît préférable au repos », « tes inutiles lumières », « tes besoins factices ».
  • retournement de situation par rapport au cliché de l’indigène sauvage et peu développé, et de l’Européen progressiste et savant.

(phrase de conclusion de la partie lors de la rédaction)

Conclusion :

La forme du texte est celle du discours, qui permet à la fois de faire passer des sentiments de colère contre la colonisation européenne, et un raisonnement logique qui nous montre les désordres créés par la colonisation dans les sociétés indigènes. Le discours interroge aussi le lecteur sur la légitimité des Européens à s’accaparer des terres à l’autre bout du monde. De plus, Diderot pose ,par une comparaison habile entre une civilisation européenne corrompue et une civilisation thaïtienne heureuse et épanouie, les principes de sa philosophie proche de la nature, et égalitaire. (réponse à l’annonce de plan)

La colonisation européenne est vue comme une malédiction terrible, qui opprime les peuples indigènes. Elle ment sur sa légitimité, sur la promesse de progrès qu’elle avance, car les Européens ne peuvent apporter le bonheur à une civilisation qui le possède déjà. (réponse à la problématique)

Ce texte nous renseigne une nouvelle fois sur la proximité philosophique de Diderot et de Rousseau quant aux lois naturelles, et à la vision du travail et du progrès. Les deux philosophes souhaitent un retour des « civilisés » à une vie primitive, déliée des besoins superflus, et surtout sans propriété, comme l’expose aussi Rousseau dans le mythe du bon sauvage. (ouverture)

(conclusion en trois parties avec reprise des conclusions partielles, réponse à la problématique, et ouverture)

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L’histoire de Polly Baker, Supplément au voyage de Bougainville, Diderot : analyse

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l'histoire de miss polly baker

L’extrait analysé va de «  Une fille, Miss Polly Baker, devenue grosse pour la cinquième fois  » jusqu’à «  il avait fait une fille publique.  »

L’histoire de Polly Baker, Supplément au voyage de Bougainville, introduction

Dans Supplément au voyage de Bougainville écrit en 1772, Diderot, un des plus célèbres philosophes des Lumières , met en scène deux personnages A et B qui rapportent leur jugement sur le livre Voyage autour du Monde du navigateur Louis Antoine de Bougainville.

L’épisode de Miss Polly Baker est une digression de B qui a été ajoutée au chapitre 3 à la suite du dialogue entre Orou et l’aumônier .

Orou et l’aumônier discutent de l’ union à l’Otaïtienne qui est fondée sur le libre choix des partenaires conformément aux prescriptions de la nature et de l’amour. L’histoire de Miss Polly Baker montre qu’au Connecticut un autre code régit les relations entre hommes et femmes : Polly Baker est en effet accusée d’avoir été mère hors mariage .

Nous verrons dans ce commentaire que Diderot laisse la parole de la défense à Miss Polly Baker elle-même (I) dans le cadre d’un apologue qui défend la condition des femmes et appelle à une justice fondée sur la nature (II).

Questions possibles à l’oral de français sur l’histoire de Miss Polly Baker

♦ En quoi ce texte est-il un texte des Lumières  ? ♦ Que défend Miss Polly Baker dans ce texte ? ♦ En quoi l’histoire de Miss Polly Baker est-il un apologue  ? ♦ L ’image de la femme dans l’épisode de Miss Polly Baker. ♦ Quelle définition de la justice Diderot donne-t-il dans ce texte ? ♦ « Il y a quelquefois des lois injustes » : cette proposition résume-t-elle le texte ?

I – Miss Polly Baker, avocate d’elle-même

A – un discours de rhétorique.

Miss Polly Baker fait un pur discours de rhétoriqu e pour convaincre et persuader son auditoire de son innocence .

Elle ouvre son discours par un exorde destinée à capter l’attention de son auditoire : « Permettez-moi, Messieurs, de vous adresser quelques mots… ».

Pour réussir cet exorde, elle joue tout d’abord sur l’ethos c’est-à-dire l’image que le locuteur souhaite donner de lui-même.

En effet, le registre soutenu utilisé par Miss Polly Baker et les formules de révérence mettent en relief ses qualités morales de façon à trouver un écho favorable chez l’interlocuteur : «  Permettez-moi, Messieurs  », «  je ne vous retiendrai pas longtemps  », «  vous daignerez  ». A travers ces mots, Miss Polly Baker renforce la position de supériorité des juges qui n’ont pas de temps à perdre.

Une fois créées les conditions d’une écoute favorable, Miss Polly Baker joue sur le pathos  : elle essaie d’éveiller leur pitié à travers l’utilisation du registre tragique .

Elle utilise ainsi la forme négative  : «  je n’ai pas le moyen de payer des avocats  », «  je ne vous retiendrai pas longtemps  », «  Je ne me flatte pas » pour suggérer le dénuement dans lequel elle se trouve.

Cette technique est un classique de la rhétorique , la vultus modestia (un air de modestie), destinée à donner une image la plus modeste possible pour créer un terrain favorable à la pitié.

Cette pitié est renforcée par les adjectifs «  malheureuse et pauvre  » qui présentent Miss Polly Baker comme une allégorie de la douleur .

Après cet exorde, Polly Baker narre son histoire personnelle qui s’apparente à une tragédie .

D’emblée, la première phrase de son récit accentue la circularité tragique dans laquelle elle se trouve enfermée : «  Voici la cinquième fois que je paraîs devant vous  ». L’adjectif ordinal «  cinquième  » crée un effet de répétition qui souligne que Miss Polly Baker est prisonnière d’un destin tragique .

Le parallélisme de construction avec la répétition de « deux fois » «  deux fois j’ai payé des amendes onéreuses, deux fois j’ai subi une punition publique et honteuse  » montre cet acharnement du destin contre Miss Polly Baker qui est condamnée toute sa vie à effectuer le même geste.

Vient ensuite la confirmation qui est le moment du discours où le locuteur expose ses arguments. Pour prouver son innocence, Miss Polly Baker utilise alors des arguments de nature très diverses :

♦ Argument moral  : la pureté morale de Miss Polly Baker ♦ Argument politique  : elle rend service à sa patrie et à son roi en faisant naître ses futurs défenseurs. ♦ Argument matrimonial  : elle n’a détruit aucune union et souhaite se marier ♦ Argument religieux  : elle n’a pas offensé la religion, au contraire elle a fait naître de nouveaux croyants .

Enfin, la péroraison vient clore le discours rhétorique par l’adverbe déictique «  voilà  » («  Voilà des crimes qui méritent plus que le mien  » )

B – Un plaidoyer

Ce discours rhétorique est un véritable plaidoyer que Miss Polly Baker met en œuvre pour plaider sa cause (un plaidoyer est le discours prononcé par l’avocat pour défendre un accusé).

Avocate d’elle-même, Miss Polly Baker utilise les mêmes techniques de persuasion que les avocats :

La théâtralité tout d’abord par l’utilisation des déictiques «  Voici  » et «  Voilà  » qui dramatisent le discours et ajoute l’action à la parole.

Miss Polly Baker implique aussi son auditoire par des apostrophes «  Messieurs  » ou des questions rhétoriques «  Mais est-ce ma faute ?  » ou «  cela ne suffit-il pas ? ». Par ce procédé, les juges sont impliqués dans la logique de Miss Polly Baker.

Ensuite, la jeune femme crée un dialogue artificiel («  On me répondra que j’ai transgressé les préceptes de la religion  ») où le «  on  » désigne un procureur imaginaire auquel elle répond par anticipation pour mieux désamorcer les contradicteurs.

En outre, des effets de rime interne donnent au lecteur l’impression que Miss Polly Baker déclame des vers de tragédie , ce qui dramatise encore un peu plus son disc ours : «  deux fois j’ai payé des amendes onér euses , deux fois j`ai subi une punition publique et hont euse » .

Polly Baker utilise également le rythme ternaire très fréquent dans la rhétorique judiciaire :

♦ j’ai fait le moindre tort à un homme , à une femme , à un enfant ♦ j’aurais la bonne conduite , l’industrie et l’économie convenables à une femme

Elle utilise aussi le coup de théâtre comme un avocat qui amène une pièce inconnue dans le procès pour ménager son effet : « Cet homme, vous le connaissez tous : il est actuellement magistrat comme vous et s’assied à vos côtés  ». Le déterminant démonstratif déictique «  cet   » rend présent celui qui l’a entraînée dans ce procès. Par un retournement de situation , la coupable devient innocente et la justice devient coupable.

Là est bien l’intention de Diderot : réfléchir à travers Miss Polly Baker sur la condition des femmes et sur la justice.

II – Un apologue pour une justice fondée sur la nature

 a – une défense de la condition des femmes.

L’histoire de Miss Polly Baker est un apologue qui prend la défense de la condition des femmes.

Comme un apologue, le texte s’ouvre sur «  Une fille  », avec un déterminant indéfini (« une » ) qui permet la généralisation de l’histoire. Miss Polly Baker est en effet l’allégorie de la femme et l’ avocate de la condition féminine .

Le lieu de l’apologue n’est pas anodin. En plaçant son récit dans le «  Connecticut  » à «  Boston  », Diderot situe son anecdote dans le nouveau monde (l’Amérique). A travers ce décentrement, il propose ainsi l’image d’une femme nouvelle qui pourrait s’extraire de la condition qui est la sienne dans la culture européenne .

Miss Polly Baker incarne d’ailleurs l’ équilibre entre la sensibilité et la raison .

Certes elle joue sur le pathos de l’auditoire mais son discours est rationnellement structuré comme en témoignent les connecteurs logiques qui ponctuent son intervention : «  mais…aussi …alors … ».

Elle est la victime d’une masculinité séductrice et coupable . Le champ lexical du crime est ainsi très présent à la fin du texte : «  mon séducteur », «  crimes  », «  séduction  », «  l’opprobre  », «  trompent  », «  état honteux  », «  troublent  », «  crimes  ».

Le terme «  séducteur  » accentuée par le déterminant possessif «  mon  » assimile l’ homme qui l’a séduite à une figure diabolique d’autant plus qu’elle insiste sur sa virginité première («  j’étais vierge encore  » ).

On retrouve une intertextualité avec Don Juan , Miss Polly Baker étant la réécriture du personnage d’ Elvire victime de la tromperie de Don Juan dans la comédie de Molière.

Mais Miss Polly Baker n’est pas une simple avocate : elle instruit aussi un procès à charge contre l’exploitation des femmes par les hommes . Diderot joue d’ailleurs sur le lexique judiciaire à travers la phrase : «  j’avais espéré qu’il paraîtrait aujourd’hui  » : le lecteur ne peut s’empêcher d’entendre « qu’il comparaîtrait aujourd’hui ». Cette quasi homophonie suggère que l’homme, véritable coupable, devrait être jugé.

La femme est pour Diderot la voix de la nature . Elle est dépouillée des artifices mortifères de la civilisation européenne. Elle est l’allégorie de la simplicité et de l’abondance comme en témoigne le champ lexical de la maternité  : «  j’ai mis cinq beaux enfants au monde  », «  nourris de mon lait  », «  soutenus de mon travail  », « fécondité  », «  donné le jour  ». Diderot fait ainsi un éloge de la féminité qui donne la vie alors que la masculinité guerrière et trompeuse sème la mort.

B – Une justice fondée sur le droit naturel

Au-delà de l’histoire de Miss Polly Baker, Diderot nous propose une réflexion sur la justice .

Le pronom indéfini «   on  » employé plusieurs fois pour désigner les juges («  jamais on ne m’a accusée « , «  on me répondra que  » ) dévoile l‘aveuglement d’une justice anonyme qui a un sens limité de l’humanité .

Miss Polly Baker par l’oxymore (juxtaposition de deux mots de sens contraires) «  loi injuste   » montre que le droit positif (= les lois élaborées par les hommes) n’est pas forcément légitime.

Diderot veut montrer la nécessité d’une justice fondée sur la nature .

Le champ lexical du sentiment à la fin du texte caractérise la réaction des magistrats : «  effet  », «  sentit  », «  remords  », «  voulut  ». Ce champ lexical montre qu’à la froideur des textes juridiques et à leur interprétation exclusivement rationnelle peut se substituer la force du sentiment qui réveille le sens de l’équité et de la réparation.

Miss Polly Baker a un rapport à la loi qui est distant voire critique : «  il y a quelquefois des lois injustes, et on les abroge  » ou «  la puissance législatrice peut dispenser de leur exécution  ». Par ces phrases, Miss Polly Baker démystifie le droit positif : la possible abrogation des textes juridiques montre que la loi n’est plus une norme absolue , indépassable.

Par cet apologue, Diderot suggère ainsi que la justice doit être fondée sur le cœur et non sur la seule raison.

Le discours de Miss Polly Baker, conclusion

Diderot compose ici un apologue qui est loin de n’être qu’une digression. Cet épisode de Miss Polly Baker s’inscrit pleinement dans la logique du Supplément au Voyage de Bougainville . Il est à charge contre la civilisation européenne étouffée selon Diderot par un rationalisme réducteur et destructeur. Le philosophe des Lumières souhaite que la culture européenne s’ouvre à la voix du cœur et de la nature .

En ce sens Diderot ouvre la voie au romantisme qui rend à la figure féminine une centralité qu’elle avait perdue dans les siècles précédents et qui remet le sentiment et la nature au cœur de l’anthropologie des Lumières .

Tu étudies Supplément au voyage de Bougainville ? Regarde aussi :

♦ Supplément au voyage de Bougainville, les adieux du vieillard ♦ Supplément au voyage de Bougainville, Diderot, l’aumônier ♦ Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, Olympe de Gouges [fiche de lecture] ♦ Lettres persanes, Montesquieu [fiche de lecture] ♦ Voltaire [fiche auteur] ♦ Jean-Jacques Rousseau [Fiche auteur] ♦ « De l’esclavage des nègres », Montesquieu : analyse ♦ L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert ♦ Jacques le fataliste, incipit : analyse ♦ I have a dream, Martin Luther King ♦ La Tresse, Colombani : fiche de lecture ♦ Femmes, soyez soumises à vos maris, Voltaire (analyse linéaire) ♦ Les femmes savantes, Molière, acte II scène 7 (analyse linéaire) ♦ Physiologie de la femme, Etienne de Neufville (analyse linéaire) ♦ Cinq mémoires sur l’instruction publique, Condorcet (analyse linéaire) ♦ Sur l’admission des femmes au droit de cité, Condorcet (analyse linéaire)

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Supplément au voyage de Bougainville: résumé et analyse

SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE. Dialogue philosophique de Denis Diderot (1713-1784), dont le titre complet est: Supplément au Voyage de Bougainville, ou Dialogue entre A et B sur l’inconvénient d’attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n’en comportent pas, publié par l’abbé Bourlet de Vauxcelles dans Opuscules philosophiques et littéraires à Paris chez Chevet en 1796. Le «discours de Polly Baker» (III) apparaît pour la première fois dans l’édition de Gilbert Chinard, donnée à Genève chez Droz en 1935 d’après le manuscrit de Leningrad.

Résumé du S upplément au voyage de Bougainville : 

  • «Jugement du Voyage de Bougainville». Par un temps de brouillard, B rapporte avec enthousiasme à A les singularités du récit du navigateur et vante la vie naturelle des sauvages, qu’illustre Aotourou, Tahitien amené en France. Un prétendu Supplément au Voyage sera le garant de ses dires.  
  • «Les Adieux du vieillard». Le Supplément s’ouvre sur le discours adressé à Bougainville avant son départ par un vieux Tahitien, qui dénonce violemment les maux apportés dans l’île par les Européens. 
  • «L’Entretien de l’aumônier et d’Orou». Le Supplément dit ensuite comment le Tahitien Orou réussit à convaincre l’aumônier de l’équipage de passer la nuit avec sa fille et le questionna, le lendemain, sur ce Dieu dont les interdictions sexuelles sont contraires à la nature. Suit un discours, rapporté par B, de Polly Baker, mère célibataire condamnée pour libertinage. 
  • «Suite de l’entretien de l’aumônier avec l’habitant de Tahiti». À Tahiti où la maternité est reine, poursuit Orou, seules sont jugées libertines les femmes stériles qui ont commerce avec des hommes. C’est l’intérêt et non le devoir qui garantit l’ordre public. Convaincu ou poli, l’aumônier honore successivement les autres filles et la femme de son hôte. 
  • «Suite du dialogue entre A et B». Face à A sceptique, B conclut que la loi de nature supplée aisément aux codes religieux et civils, qui ont dénaturé l’union des sexes. Mais il vaut mieux se conformer aux lois de son pays plutôt que d’être sage parmi les fous. Retour symbolique du beau temps.

Analyse du Supplément : 

Une utopie critique :.

Inspirée par le Voyage autour du monde (1771) de Louis Antoine de Bougainville, l’œuvre de Diderot participe du «mirage océanien» qui fit voir en Tahiti la nouvelle Cythère. Mais elle n’a rien d’un divertissement exotique ou grivois ; l’utopie tahitienne permet à l’auteur, comme l’indique le sous-titre, de mettre en cause le lien qu’établissent nos sociétés chrétiennes entre relations sexuelles et moralité. À ce titre, le Supplément ne se conçoit pas sans Ceci n’est pas un conte et Madame de La Carlière qui, portant sur la morale sexuelle, forment avec lui un triptyque. Les amours désastreuses autant que policées des personnages de ces contes, cités à la fin du Supplément , servent de prélude à l’évocation de la sexualité libre et heureuse des sauvages tahitiens, qui illustre la conciliation possible entre l’amour et les mœurs. La réflexion morale débouche ainsi, dans cette œuvre que l’on a parfois considérée comme l’expression de la pensée ultime de Diderot, sur une théorie politique, fondée sur l’accord entre les lois et la nature. Les mauvaises mœurs ne sont pour Diderot que l’effet d’une mauvaise législation : en bridant les appétits naturels, les codes religieux et civil ont, dans l’Europe vieillissante, corrompu les mœurs. La jeune société tahitienne, elle, a atteint ce point d’équilibre qui la situe à mi-chemin entre les rigueurs du primitivisme et la dégénérescence qui guette toute civilisation. On aurait tort, pourtant, de voir avec Vauxcelles dans le Supplément une «sans-culotterie» ; la «conclusion» du texte n’a rien de révolutionnaire, qui édicte : «Nous parlerons contre les lois insensées jusqu’à ce qu’on les réforme, et en attendant nous nous y soumettrons.»

Il paraît difficile, en effet, au nom d’une illusoire cohérence de la pensée diderotienne, d’interpréter l’œuvre polyphonique qu’est le Supplément à la lumière de la seule diatribe anticolonialiste du vieillard ou même de la sévère critique faite par Orou de la morale chrétienne. Il ne faut pas oublier qu’en 1772, au moment de la rédaction du Supplément , le philosophe mariait sa fille le plus bourgeoisement du monde. Rêverie à la manière de Diderot (nous savons combien était codifiée et hiérarchisée cette société tahitienne), le Supplément énonce seulement l’hypothèse d’une autre organisation sociale, dont le philosophe tire ailleurs, dans l’Histoire des deux Indes , des conséquences plus radicales. Ce que Diderot a en tête ici, à la veille de son départ pour Saint-Pétersbourg, c’est un projet de réforme applicable dans la toute jeune Russie, dont il fera état dans ses Mémoires pour Catherine II .

Une pensée en mouvement :

On a pu qualifier de «baroque» l’art de Diderot et déceler dans l’arrangement, voire le contenu du Supplément , des contradictions. L’auteur semble, il est vrai, défier toute logique en plaçant le discours d’adieu avant l’arrivée de l’équipage, en confondant dans le titre «supplément» et «dialogue» qui alternent dans l’œuvre, en prêtant tour à tour à ses apparents porte-parole (B? le vieillard? Orou?) des discours divergents. Mais ne faut-il pas plutôt voir dans cette structure éclatée le signe d’une pensée en mouvement, favorisée par les vertus du dialogue et de la supplémentarité ? Les cinq sections du Supplément, qui s’articulent fermement autour d’une lecture de Bougainville, abordent les mêmes thèmes (liberté, propriété, comportement matrimonial...), mais les orchestrent différemment. Si la conversation initiale exalte à travers Bougainville les Lumières, le discours du vieillard lui oppose la corruption européenne, qui appelle un remède, proposé par Orou dans l’entretien avec l’aumônier : la conversion aux lois de la nature. À la fin du dialogue entre A et B, le directeur de l’Encyclopédie, disant son dernier mot, réaffirme sa foi dans le progrès, qu’il avait mise entre parenthèses pour «abandonne[r] [son] esprit à tout son libertinage» (début du Neveu de Rameau ). En cela il se distingue du Rousseau des Discours, dont la critique morale est sous-tendue par une volonté de réforme politique.

Le thème central du Supplément n’est pas neuf. Depuis Montaigne, les «philosophes nuds» avaient fait florès dans la littérature française et le Supplément véhicule bien des idées répandues chez les contemporains de Diderot (le populationnisme, par exemple). L’originalité de Diderot réside dans l’accent qu’il met sur le caractère physiologique de l’amour. C’est sans doute ce qui explique le retentissement de l’œuvre, qui inspira à Musset quelques strophes du poème “Souvenir”, ne fut pas étrangère aux thèses du socialiste Paul Lafargue sur «le droit à la paresse» et fut l’objet d’un pastiche de Giraudoux, le Supplément au Voyage de Cook (1935).

ALBERTAN-COPPOLA, in Dictionnaire des oeuvres littéraires de langue française. © Bordas, Paris 1994

Plus d'articles: 

Fiche : Les lumières (XVIIIe siècle)

Bac de français

Pour aller plus loin: 

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L’aumônier et orou.

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Dans la division que les Taïtiens se firent de l’équipage de Bougainville, l’aumônier devint le partage d’Orou. L’aumônier et le Taïtien étaient à peu près du même âge, trente-cinq à trente-six ans. Orou n’avait alors que sa femme et trois filles appelées Asto, Palli et Thia. Elles le déshabillèrent, lui lavèrent le visage, les mains et les pieds, et lui servirent un repas sain et frugal. Lorsqu’il fut sur le point de se coucher, Orou, qui s’était absenté avec sa famille, reparut, lui présenta sa femme et ses trois filles nues, et lui dit : – Tu as soupé, tu es jeune, tu te portes bien ; si tu dors seul, tu dormiras mal ; l’homme a besoin la nuit d’une compagne à son côté. Voilà ma femme, voilà mes filles : choisis celle qui te convient ; mais si tu veux m’obliger, tu donneras la préférence à la plus jeune de mes filles qui n’a point encore eu d’enfants. La mère ajouta : – Hélas ! je n’ai point à m’en plaindre ; la pauvre Thia ! ce n’est pas sa faute. L’aumônier répondit que sa religion, son état, les bonnes mœurs et l’honnêteté ne lui permettaient pas d’accepter ces offres. Orou répliqua : – Je ne sais ce que c’est que la chose que tu appelles religion ; mais je ne puis qu’en penser mal, puisqu’elle t’empêche de goûter un plaisir innocent, auquel nature, la souveraine maîtresse, nous invite tous ; de donner l’existence à un de tes semblables ; de rendre un service que le père, la mère et les enfants te demandent ; de t’acquitter avec un hôte qui t’a fait un bon accueil, et d’enrichir une nation, en l’accroissant d’un sujet de plus. Je ne sais ce que c’est que la chose que tu appelles état ; mais ton premier devoir est d’être homme et d’être reconnaissant. Je ne te propose point de porter dans ton pays les mœurs d’Orou ; mais Orou, ton hôte et ton ami, te supplie de te prêter aux mœurs de Taïti. Les mœurs de Taïti sont-elles meilleures ou plus mauvaises que les vôtres ? c’est une question facile à décider. La terre où tu es né a-t-elle plus d’hommes qu’elle n’en peut nourrir ? en ce cas tes mœurs ne sont ni pires, ni meilleures que les nôtres. En peut-elle nourrir plus qu’elle n’en a ? nos mœurs sont meilleures que les tiennes. Quant à l’honnêteté que tu m’objectes, je te comprends ; j’avoue que j’ai tort ; et je t’en demande pardon. Je n’exige pas que tu nuises à ta santé ; si tu es fatigué, il faut que tu te reposes ; mais j’espère que tu ne continueras pas à nous contrister. Vois le souci que tu as répandu sur tous ces visages : elles craignent que tu n’aies remarqué en elles quelques défauts qui leur attirent ton dédain. Mais quand cela serait, le plaisir d’honorer une de mes filles, entre ses compagnes et ses sœurs, et de faire une bonne action, ne te suffirait-il pas ? Sois généreux ! L’aumônier. – Ce n’est pas cela : elles sont toutes quatre également belles ; mais ma religion ! mais mon état ! Orou. – Elles m’appartiennent, et je te les offre : elles sont à elles, et elles se donnent à toi. Quelle que soit la pureté de conscience que la chose religion et la chose état te prescrivent, tu peux les accepter sans scrupules. Je n’abuse point de mon autorité ; et sois sûr que je connais et que je respecte les droits des personnes. Ici, le véridique aumônier convient que jamais la Providence ne l’avait exposé à une aussi pressante tentation. Il était jeune ; il s’agitait, il se tourmentait ; il détournait ses regards des aimables suppliantes ; il les ramenait sur elles ; il levait ses mains et ses yeux au ciel. Thia, la plus jeune, embrassait ses genoux et lui disait : – Étranger, n’afflige pas mon père, n’afflige pas ma mère, ne m’afflige pas ! Honore-moi dans la cabane et parmi les miens ; élève-moi au rang de mes sœurs qui se moquent de moi. Asto l’aînée a déjà trois enfants ; Palli, la seconde, en a deux, et Thia n’en a point ! Étranger, honnête étranger, ne me rebute pas ! rends-moi mère ; fais-moi un enfant que je puisse un jour promener par la main, à côté de moi, dans Taïti ; qu’on voie dans neuf mois attaché à mon sein ; dont je sois fière, et qui fasse une partie de ma dot, lorsque je passerai de la cabane de mon père dans une autre. Je serai peut-être plus chanceuse avec toi qu’avec nos jeunes Taïtiens. Si tu m’accordes cette faveur, je ne t’oublierai plus ; je te bénirai toute ma vie ; j’écrirai ton nom sur mon bras et sur celui de ton fils ; nous le prononcerons sans cesse avec joie ; et, lorsque tu quitteras ce rivage, mes souhaits t’accompagneront sur les mers jusqu’à ce que tu sois arrivé dans ton pays. Le naïf aumônier dit qu’elle lui serrait les mains, qu’elle attachait sur ses yeux des regards si expressifs et si touchants ; qu’elle pleurait ; que son père, sa mère et ses sœurs s’éloignèrent ; qu’il resta seul avec elle, et qu’en disant : Mais ma religion, mais mon état, il se trouva le lendemain couché à côté de cette jeune fille, qui l’accablait de caresses, et qui invitait son père, sa mère et ses sœurs, lorsqu’ils s’approchèrent de leur lit le matin, à joindre leur reconnaissance à la sienne. Diderot,  Supplément au voyage de Bougainville , 1772 > Texte intégral, Paris, Garnier frères, 1875-1877  

XiTi

Commentaire littéraire

Rédigé le 1 November 2009

4 minutes de lecture

voyage de bougainville analyse

C'est un vieillard qui parle. Il était père d'une famille nombreuse. À l'arrivée des Européens, il laissa tomber des regards de dédain sur eux, sans marquer ni étonnement, ni frayeur, ni curiosité. Ils l'abordèrent ; il leur tourna le dos et se retira dans sa cabane. Son silence et son souci ne décelaient que trop sa pensée : il gémissait en lui-même sur les beaux jours de son pays éclipsés. Au départ de Bougainville, lorsque les habitants accouraient en foule sur le rivage, s'attachaient à ses vêtements, serraient ses camarades entre leurs bras, et pleuraient, ce vieillard s'avança d'un air sévère, et dit : « Pleurez malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ce soit de l'arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants : un jour, vous les connaîtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attaché à la ceinture de celui­ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui­là, dans l'autre, vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices ; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux. Mais je me console ; je touche à la fin de ma carrière ; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. O tahitiens ! mes amis ! vous auriez moyen d'échapper à un funeste avenir ; mais j'aimerais mieux mourir que de vous en donner le conseil. Qu'ils s'éloignent, et qu'ils vivent. »

Puis s'adressant à Bougainville, il ajouta :

« Et toi, chef des brigands qui t'obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive : nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tenté d'effacer de nos âmes son caractère. Ici tout est à tous ; et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagé ce privilège avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu féroce entre les leurs. Elles ont commencé à se haïr ; vous vous êtes égorgés pour elles ; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres ; et voilà que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n'es ni un dieu, ni un démon : qui es­tu donc, pour faire des esclaves ? Orou ! toi qui entends la langue de ces hommes­là, dis­nous à tous, comme tu me l'as dit à moi-même, ce qu'ils ont écrit sur cette lame de métal : Ce pays est à nous. Ce pays est à toi ! et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? Si un Tahitien débarquait un jour sur vos côtes, et qu'il gravât sur une de vos pierres ou sur l'écorce d'un de vos arbres : Ce pays est aux habitants de Tahiti, qu'en penserais­tu ? Tu es le plus fort ! Et qu'est­ce que cela fait ? Lorsqu'on t'a enlevé une des méprisables bagatelles dont ton bâtiment est rempli, tu t'es récrié, tu t'es vengé ; et dans le même instant tu as projeté au fond de ton coeur le vol de toute une contrée ! Tu n'es pas esclave : tu souffrirais plutôt la mort que de l'être, et tu veux nous asservir ! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas défendre sa liberté et mourir ? Celui dont tu veux t'emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frère. Vous êtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ? Tu es venu ; nous sommes­nous jetés sur ta personne ? -avons­nous pillé ton vaisseau ? t'avons­nous saisi et exposé aux flèches de nos ennemis ? t'avons­nous associé dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respecté notre image en toi. Laisse nous nos moeurs ; elles sont plus sages et plus honnêtes que les tiennes ; nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance, contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons. Sommes­nous dignes de mépris, parce que nous n'avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos cabanes, qu'y manque-t-il, à ton avis ? Poursuis jusqu'où tu voudras ce que tu appelles commodités de la vie ; mais permets à des êtres sensés de s'arrêter, lorsqu'ils n'auraient à obtenir, de la continuité de leurs pénibles efforts, que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l'étroite limite du besoin, quand finirons­nous de travailler ? Quand jouirons­nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journalières la moindre qu'il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au repos. Va dans ta contrée t'agiter, te tourmenter tant que tu voudras ; laisse­nous reposer : ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques. Regarde ces hommes ; vois comme ils sont droits, sains et robustes. Regarde ces femmes ; vois comme elles sont droites, saines, fraîches et belles. Prends cet arc, c'est le mien ; appelle à ton aide un, deux, trois, quatre de tes camarades ; et tâchez de le tendre. Je le tends moi seul. Je laboure la terre ; je grimpe la montagne ; je perce la forêt ; je parcours une lieue de la plaine en moins d'une heure. Tes jeunes compagnons ont eu peine à me suivre ; et j'ai quatre-vingt-dix ans passés. Malheur à cette île ! malheur aux Tahitiens présents, et à tous les Tahitiens à venir, du jour où tu nous as visités !

Denis Diderot, Supplément au Voyage de Bougainville, 1772.

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Diderot, Supplément au voyage de Bougainville, “ Les adieux du vieux Tahitien “, 1796

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Il était père d'une famille nombreuse. A l'arrivée des Européens, il laissa tomber des regards de dédain sur eux,sans marquer ni étonnement,ni frayeur,ni curiosité.Ils abordèrent; il leur tourna le dos, se retira dans sa cabane.Son silence son souci ne décelait que trop sa pensée: il gémissait en lui même sur les beaux jours de son pays éclipsés. Au départ de Bougainville, lorsque les habitants accouraient en foule sur le rivage, s'attachaient à ses vêtements, serraient ses camarades entre leurs bras, et pleuraient, ce vieillard s'avança d'un air sévère, et dit : "Pleurez, malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ci soit de l'arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants : un jour, vous les connaîtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voulez attaché à la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui-là, dans l'autre, vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices ; un jour vous servirez sous eux aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux mais je me console ; je touche à la fin de ma carrière ; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. Tahitiens ! mes amis ! vous auriez un moyen d'échapper à un funeste avenir ; mais j'aimerais mieux mourir que de vous eu donner le conseil. Qu'ils s'éloignent, et qu'ils vivent." Puis s'adressant à Bougainville, il ajouta : "Et toi, chef des brigands qui t'obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive : nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tenté d'effacer de nos âmes son caractère. Ici tout est à tous ; et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagé ce privilège avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu féroce entre les leurs. Elles ont commencé à se haïr ; vous vous êtes égorgés pour elles ; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres ; et voilà que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n'es ni un dieu, ni un démon : qui es-tu donc, pour faire des esclaves ? 0rou ! toi qui entends la langue de ces hommes-là, dis-nous à tous, comme tu me l'as dit à moi-même, ce qu'ils ont écrit sur cette lame de métal : Ce pays est à nous. Ce pays est à toi ! et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? Si un Tahitien débarquait un jour sur vos côtes, et qu'il gravât sur une de vos pierres ou sur l'écorce d'un de vos arbres : Ce pays est aux habitants de Tahiti, qu'en penserais-tu ? Tu es le plus fort ! Et qu'est-ce que cela fait ? Lorsqu'on t'a enlevé une des méprisables bagatelles dont ton bâtiment est rempli, tu t'es récrié, tu t'es vengé ; et dans le même instant tu as projeté au fond de ton cœur le vol de toute une contrée ! Tu n'es pas esclave : tu souffrirais plutôt la mort que de l'être, et tu veux nous asservir ! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas défendre sa liberté et mourir ? Celui dont tu veux t'emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frère. Vous êtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ? Tu es venu ; nous sommes-nous jetés sur ta personne ? avons-nous pillé ton vaisseau ? t'avons-nous saisi et exposé aux flèches de nos ennemis ? t'avons-nous associé dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respecté notre image en toi. Laisse nous nos mœurs ; elles sont plus sages et plus honnêtes que les tiennes ; nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance, contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris, parce que nous n'avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir.

Dans ce texte, un vieux tahitien est mis en scène durant son apostrophe à Bougainville.

Comment Diderot fait il le réquisitoire contre l’Europe, faisant ainsi l’éloge des tahitiens par le biais d’un discours s’inscrivant donc dans l’esprit des Lumières ?

Nous verrons dans un premier temps comment le vieux tahitien, porte parole de Diderot, annonce l’arrivée d’ une apocalypse avant de nous attaquer au réquisitoire que ce dernier fait contre l' intrusion des Européens, leurs vices, leur corruption et la décadence de leur civilisation. Enfin cela nous permettra de montrer l’éloge de la société tahitienne érigée en modèle utopique selon Diderot.

Mouvement 1 : L’annonce d’une apocalypse (l.1-l15)

1. voix d’un vieillard ? : ➔ Associé à la sagesse , liée à l’expérience ➔ Hors des jeux de pouvoir ( le vieillard est le plus libre de dire ce qu’il pense directement) ➔ Hors des jeux de comédies de protocole et de "bienséance" vis-à vis de la hiérarchie sociale ➔ Plus grande lucidité et moins facilement "influençable" que les + jeunes (facilement “bernés” par des accessoires et objets de pacotille). ➔ l’utilisation de l’impératif : mode de l’ordre, de l’injonction, de la prière renforce la stature du vieillard.

2. Le VT (vieux tahitien) s’adresse à ses congénères à travers l’apostrophe : “Tahitiens”. (L.10)

3. Il le fait sur un ton tragique “Pleurez, malheureux Tahitiens! Pleurez”, servie par la reprise anaphorique du verbe pleurer. (L.10)

4. Le VT adopte une voix prophétique/ visionnaire qui met en garde et annonce la catastrophe à venir : ➔ L’annonce d’une apocalypse (destruction; revirement; basculement compter du monde) servie par le champ lexical de l’apocalypse : "enchaîner"; “égorger”; "assujettir" “ calamité”. ➔ Emploi répété du Futur Simple de l’indicatif ( mode du réel) est utilisé : VT certain de ce qu’il dit et ce qui va se passer : “ils reviendront” “servirez”. (L. 12-15) ➔ exclamatives ➔ anaphore : “un jour”

5. périphrase pour désigner l’arc et l’épée des Européens : ➔ référence au bois et au fer qui représente symboliquement la domination par la violence. -> Âge de fer(qui représenterait les Européens) en opposition avec l'âge d'or ( c'était le temps de l'innocence, de la justice, de l'abondance et du bonheur, qui représenterait les Tahitiens).

6. rythme ternaire à 3 temps étayé à la gradation ascendante : “vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir “ met en relief le déséquilibre créé par l’arrivée des européens → changement des coutumes tahitiennes . 7. “vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices “ : annonce la prochaine transformation culturelle, la contamination par la pensée de vices , l’hybridation culturelle . (L. 15)

8. rythme ternaire : “aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux “ } déséquilibre renforcé par l’anaphore “aussi “ (L. 16)

9. La fréquence des pronoms personnels de la première personne renforce la véhémence (violence) du ton et par conséquent nous indique la présence du registre polémique. Ce pronom personnel permet aussi de montrer la distance entre le VT et les “autres” tahitiens → Il ne pense pas comme eux et ne verra pas la catastrophe à venir

10. Le pathétique de cette annonce est renforcé par la proximité du VT avec la mort.

11. conseil : de ne pas les laisser partir et de tuer les européens pour mettre fin à la colonisation de Tahiti. S’ils les aimaient , il n'y aurait pas eu les premiers écrits de Bougainville. VT ne donne pas ce conseil car ne veut pas prendre l'innocence des Tahitiens + respectueux de la vie humaine + refuse d'utiliser la violence contre colonisateurs : n’est pas aveuglé par la haine.

Mouvement 2 : un véritable réquisitoire à l’encontre de la civilisation européenne : l.16 à 36

1. le destinataire du VT change il s’agit maintenant de Bougainville “Et toi” = considéré comme étant le représentant des européens. (L. 22)

2. Cette apostrophe vise à dénoncer le matérialisme propre aux européens, elle est servie par la périphrase de “chef des brigands” => péjoratif = signifie : bandit, malfaiteur, voleur. (L. 22)

3. "Et toi, chef des brigands qui t'obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive" => allitérations agressives en [t] et en [r] pour parler des colons. (L. 22) + opposition entre “ton” et “notre”.

4. Le VT porte un jugement péjoratif sur la civilisation européenne et leur comportement :

➔ l’individualisme : Bougainville de s’exprime qu'avec des adjectifs et pronoms personnels qui révèlent du singulier. (vs altruisme)

source de vices (vs innocence) : “nous somme innocent” [...] “et tu as tenté d’effacer de nos âmes son caractère “ (L. 24)

➔ source de malheur( vs bonheur Tahitien) “tu ne peux que nuire à notre bonheur" (L. 24)

➔ Européens sont décrits comme accordant une grande importance à la propriété “ distinction du tien et du mien “ (vs partage)

➔ critique la monogamie liée à la conception à la fois chrétienne et bourgeoise de la famille chez les EURO. La question de la sexualité qui était un élément socialement stabilisateur chez les tahitiens devient avec l'arrivée des européens déséquilibre social et un élément d’érosion sociale. Ce rapport de possession a créé un déséquilibre social qui a engendré violence et jalousie : « tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues » , « elles sont devenues folles dans tes bras »« vous vous êtes égorgées pour elles » et animalisation “tu es devenu féroce entre les leurs”. + “Elle ont commencé à se haïr “ (L. 28-31)

➔ dénonciation brutalité européen qui est renforcée par une gradation ascendante au sein du champ lexical de la violence : “fureur”; “féroce” et “féroce”+ appuyé par une allitération en (f) qui fait allusion a la folie .

5-L’antithèse entre liberté et esclavage est mise en évidence tout au long des adieux du vieillard dans : “Nous sommes libres; et voila que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage”. (L. 33)

6. Le rejet de la  supériorité des européens passant est renforcé par la double négation totale de toute forme de supériorité qui sous entend que Bougainville n’est qu’un homme, qui n’a pas de statut particulier qui lui donnerait le droit d’asservir des peuples : Tu n’est ni un dieu, ni un démon”. + Statut pas clair ni un sauveur ni un démon

7. Le VT s’adresse à Orou comme étant un témoin oculaire. En convoquant Orou dans son argumentation le VT à recours à un argument d’autorité (un argument qui se fonde sur le poids intellectuel d’une référence en la matière) ici, le seul tahitien qui comprend la langue des européens Orou.

8. contraste entre “ Ce pays est à nous” VS vol d’une “de tes méprisables bagatelles” → Vol de toute une contrée VS bijoux, verres précieux

9. raisonnement par l’absurde VT qui crée un renversement de situation: l’esclave devient colons/ les colons devient esclave. -> effet recherché, amener Bougainville à un travail d'identification à la souffrance de l’esclave pour une véritable catharsis (Aristote dans son œuvre la Poétique il définit la catharsis comme étant la purgation des âmes et des instincts noirs).

10. Aspect de supériorité de la Liberté par rapport à la mort. } la Liberté comme bien suprême. On relève une gradation vers l’idée de mort possible pour cet état : “ défendre sa liberté et mourir “

11. : “le Tahitien est ton frère” autre argument contre le colonialisme: l’unité du genre humain, unigenitus. (L. 48)

12. : La fréquence des pronoms personnels 2ème personne renforce la véhémence (violence) du ton et par conséquent le registre polémique. => procès mis en place par le VT

Mouvement 3 : L'Éloge de la société tahitienne.

1- La série de questions rhétoriques visent à mettre en valeur des évidences. Elles n'attendent pas de réponse. C'est donc un véritable outil de persuasion.

2. Sens du partage/ communauté: renforcé d’abord par l’utilisation systématique du “nous” et ses avatars à valeur inclusive.

3. Métaphore filée de la mère nourricière de tous les peuples : gradation de cette idée avec « Nous avons respecté notre image en toi » qui réunit “nous” et “toi “ dans un "autre" qui désigne l’humanité” + montre société tahitienne est basée sur des valeurs fondamentales :La tolérance (L. 54)

4. VT parle des mœurs des Tahitiens. Il montre qu'elles sont meilleures que celles des Européens grâce à la répétition et à la comparaison : « plus sages et plus honnêtes que les tiennes » (L. 55)

5. Alors que les européens se persuadent de leur supériorité et pensent apporter leurs « lumières » aux tahitiens (« Nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. » ), le discours structuré du vieillard, sa tolérance, son analyse et son ouverture d’esprit contredisent la prétendue ignorance des tahitiens. → Mise en abîme des “Lumières” (=un philosophe des lumières critique le concept des Lumières)

6. Tout ce dont ils ont besoin, les tahitiens le trouvent dans la nature.Ainsi, ils ne manquent de rien, ce qui est renforcé par l’hyperbole « Tout » (« Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons» ).

7. L’absence de superflus est important «tout ce qui est nécessaire et bon nous le possédons » (L. 58)

8. Structure binaire des phrases qui suggère la facilité avec laquelle ils subviennent à leurs besoins : « Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir »(L. 61).Les tahitiens vivent selon une morale épicurienne qui consiste à borner ses ambitions ou ses désirs pour atteindre le bonheur dans une vie simple. Leur existence et leurs désirs sont limités aux besoins immédiats : « faim », «froid »

Enfin, Diderot à travers son texte fait un véritable requisitoire contre les européens dénonçant leur l'ethnocentrisme, leur corruption, leurs vices, la décadence de leurs civilisation et l’esclavage passant par l’exploitation du regard étranger. A travers ce blâme, la société tahitienne semble paradisiaque en raison de sa société qui repose sur les principes de sobriété, de frugalité,d' hospitalité, de partage, d' harmonie avec la nature et de bonheur.Son argumentation s’organise sous la forme d’un discours au carrefour des genres littéraires.

Nous avons dans ce même sens Les lettres persanes de Montesquieu , qui lui aussi au même siècle, exploite le thème du regard étranger afin de dénoncer l’eurocentrisme

Supplément au Voyage de Bougainville, Diderot, découverte de l'autre et d'un nouveau monde. Bac de l'EAF 2021

Commentaire littéraire, supplément au voyage de bougainville, diderot, chapitre ii. bac de français 2021, bougainville, voyage autour du monde- commentaire littéraire littérature d'idées, bac de français 2021, voyage, altérité et engagement-diderot, supplément au voyage de bougainville - littérature d'idées eaf 2021, voyage, altérité et engagement-diderot, supplément au voyage de bougainville ch. 4 - littérature d'idées eaf 2021, condorcet, réflexions sur l’esclavage des nègres-comment l’ouverture à l’autre favorise la découverte de soi-même et l’engagement pour l’égalité, montesquieu, de l’esprit des lois, « de l’esclavage des nègres »- un réquisitoire contre l’esclavage. littérature d'idées 2021, cyrano de bergerac, l'autre monde ou les états et empires de la lune -comment la relation de voyage permet-elle la réflexion sur l'autre eaf 2021, bouvier, l'usage du monde, commentaire littéraire. comment le locuteur définit-il le voyage dans cet extrait eaf, littérature d'idées 2021.

Montaigne, les Essais.Découverte d'un autre monde 15

Montesquieu, "Lettres persanes" / parcours : Le regard éloigné 6

Le mythe du bon sauvage. Qu'est-ce que l'état de nature? 7

Dissertations sur des oeuvres au programme, littérature d'idées 18

Voltaire, "L'Ingénu" "Candide"/ parcours : Voltaire, esprit des Lumières. EAF 2021 5

Jean de La Fontaine, "Fables" (livres VII à XI) / parcours EAF 2021 : Imagination et pensée au XVIIe siècle. 11

Léry, Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil, chapitre XIII, commentaire littéraire, littérature d'idées, EAF 2021

Etude linéaire de léry, histoire d’un voyage fait en la terre de brésil, ch 18 : comment raconte-t-il une histoire dont il connaît déjà le dénouement.

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Date de dernière mise à jour : 21/11/2022

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Arrivée de Bougainville à Tahiti en avril 1768, par Gustave Alaux.© Musée national de la Marine.

Bougainville, premier navigateur français autour du monde

Époque moderne

question réponse

au sommaire

Il commence à faire parler de lui avec le projet français d'implantation aux îles Malouines en 1764. Ces îles situées dans l'Atlantique Sud pourraient compenser la perte du domaine de pêche pêche canadien, à la suite du traité de Paris de 1763 qui donne tous les territoires français nord-américains à l'Angleterre sauf Saint-Pierre-et-Miquelon. Plusieurs familles d' Acadiens sont ainsi débarquées aux Malouines pour fonder une colonie : Louis XV approuve la prise de possession de ces nouvelles terres en juin 1764. Mais l'Espagne proteste et exige la restitution des îles car elle considère que les Malouines font partie de son domaine américain depuis le traité de Tordesillas de 1494 (qui partage alors le Nouveau Monde connu entre Espagnols et Portugais). Le ministre Choiseul envoie Bougainville remettre les Malouines aux Espagnols pour ne pas qu'elles tombent entre les mains des Anglais.

Portrait de Louis-Antoine de Bougainville par Jean-Pierre Franque. © Château de Versailles, domaine public.

L'exploration du Pacifique et des terres australes

Mais la véritable expédition de Bougainville est motivée par la volonté française d'explorer le Pacifique, dernier océan quasiment inconnu au XVIII e siècle et de confirmer l'existence du mythique continent austral que les Hollandais n'ont fait qu'effleurer au XVII e siècle. Bougainville à la tête de la mission scientifique doit se diriger vers les terres australes du Pacifique puis les Moluques, afin de trouver une île proche des côtes de Chine qui pourrait servir d'entrepôt à la Compagnie française des Indes (la Chine n'autorisant aucune installation européenne sur son sol).

Le fameux voyage autour du monde débute en novembre 1766, sur la frégate  La Boudeuse.  Accompagné de botanistes botanistes , astronomes astronomes , cartographes, Bougainville est rejoint à Rio de Janeiro par le bateau  L'étoile  en juin 1767. Au Brésil, le botaniste Philibert Commerson découvre la fleur qui sera nommée « bougainvillée ». Après avoir remis les îles Malouines aux Espagnols, Bougainville franchit le détroit de Magellan et explore le sud de l' archipel archipel des Tuamotu. En avril 1768, l'expédition se trouve à Tahiti  ; en mai, c'est l'archipel des Samoa : peu d'échanges interviennent avec les Polynésiens et aucun scientifique ne pose pied à terre. Bougainville atteint l'archipel des Louisiades (en Papouasie-Nouvelle Guinée), ainsi nommé en l'honneur du roi Louis XV. Il longe ensuite les îles Salomon et découvre l'île Bougainville, le 30 juin 1768. En septembre, il se ravitaille enfin aux Moluques : l'équipage souffre du scorbut scorbut depuis son entrée dans l'océan Pacifique. 

Carte représentant le périple de Bougainville autour du monde entre 1766 et 1769. © GNU Free Documentation License, Wikimedia commons.

Il rentre à Saint-Malo le 16 mars 1769 et publie en 1771, la monumentale description de son Voyage autour du monde ,   financée par Louis XV. L'auteur évoque les conditions de vie à bord des bateaux, les échanges commerciaux entre marins et insulaires ; il décrit la colonie espagnole de l'actuelle Argentine , les paysages de Patagonie, Tahiti et les possessions hollandaises d'Indonésie. Son témoignage contribue à une meilleure connaissance géographique de l'Océanie et à l'enrichissement des collections naturalistes par la découverte de nouvelles espèces espèces végétales et animales.

Page de présentation du récit du <em>Voyage autour du monde </em>de Bougainville, publié en 1771 (timbre de la Bibliothèque royale).

La finalité de l'expédition était avant tout politique : assurer la maîtrise de nouvelles voies maritimes et conquérir des terres inconnues au nom du roi, constituaient l'objectif de la mission dévolue à Bougainville. Diderot le critique violemment en 1772, dans son  Supplément au voyage de Bougainville  : il l'accuse d'avoir colonisé Tahiti et converti de force les indigènes indigènes . Mais l'aventure australe est en route : d'autres grands navigateurs navigateurs vont suivre tels James Cook pour l'Angleterre et Jean-François de La Pérouse pour Louis XVI.

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COMMENTS

  1. Supplément au voyage de Bougainville

    Supplément au voyage de Bougainville, de Denis Diderot, fait référence au voyage de l'explorateur Bougainville en Océanie. Ce texte soulève le problème du colonialisme et célèbre la vie sauvage par rapport à l'homme civilisé, ici dénigré.

  2. Denis Diderot, Supplément au voyage de Bougainville

    Analyse de l'oeuvre La composition du conte philosophique. Supplément au voyage de Bougainville de Diderot est divisé en cinq chapitres. Il y a 25 pages de dialogue entre A et B, 25 pages d'échanges entre l'aumônier et Orou ainsi que 15 pages de monologues individuels du vieillard et de Polly Baker. La composition du conte ...

  3. Analyse du Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot

    1) La remise en cause de la religion. Le point de vue, dans le Supplément au voyage de Bougainville, est celui d'un tahitien fictif. Ce point de vue étranger permet à Diderot de faire passer ses idées en se protégeant de la censure.

  4. Supplément au Voyage de Bougainville

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  5. Supplément au voyage de Bougainville: résumé et analyse

    Analyse du Supplément : Une utopie critique : Inspirée par le Voyage autour du monde (1771) de Louis Antoine de Bougainville, l'œuvre de Diderot participe du «mirage océanien» qui fit voir en Tahiti la nouvelle Cythère.

  6. Supplément au voyage de Bougainville Profil d'œuvre

    1772. Supplément au voyage de Bougainville de Diderot est un dialogue opposant deux façons de penser, de vivre. Les thèmes principaux sont le colonialisme et la vie sauvage. L'auteur compare l'homme civilisé orgueilleux et l'homme naturel libre. C'est quelques années après sa visite à Catherine II de Russie que Diderot écrit cet ouvrage.

  7. Supplément au Voyage de Bougainville

    Le Supplément au Voyage de Bougainville, ou Dialogue entre A et B sur l'inconvénient d'attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n'en comportent pas, est un conte philosophique de Denis Diderot écrit en mai 1772 [1].

  8. Supplément au voyage de Bougainville

    Le Supplément se présente comme un dialogue sur le récit, publié par Bougainville, de son voyage autour du monde et de son séjour à Tahiti, surnommé la Nouvelle Cythère, car les amours y seraient libres. Le décor est exotique mais le propos de Diderot radical. Un dialogue s'ouvre au second degré entre les Tahitiens et les Européens.

  9. SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE

    Une œuvre polyphonique. Le Supplément au Voyage de Bougainville fait entendre plusieurs voix : les deux interlocuteurs, A et B, commentent, texte à l'appui, ce Voyage que B est en train de lire, et dont il prétend restituer l'intégralité, car les passages licencieux en auraient été supprimés. Cette fiction justifie le « supplément », terme défini par le Dictionnaire de Trévoux ...

  10. Supplément au voyage de Bougainville, Denis Diderot

    Fiche de lecture sur Supplément au voyage de Bougainville, Denis Diderot : ️ résumé ️ personnages ️ citations ️ thèmes... par SchoolMouv ® N°1 pour apprendre & réviser.

  11. Le discours du vieillard, Supplément au voyage de Bougainville

    Discours du vieillard, Supplément au voyage de Bougainville, Diderot : analyse. Par Amélie Vioux. 22 décembre 2015. 29 commentaires. Voici un commentaire du « discours du vieux tahitien », extrait du chapitre 2 du Supplément au voyage de Bougainville de Diderot ( publié en 1796).

  12. D. Diderot, Supplément au voyage de Bougainville, 1772

    Diderot voulut apporter un regard critique à la découverte de Bougainville et publia en 1772 un Supplément au voyage de Bougainville dans lequel il fait entendre un autre discours, celui d'un indigène, un chef tahitien qui s'adresse directement à Bougainville.

  13. Le discours du vieillard, supplément au voyage de Bougainville

    Le discours du vieillard, supplément au voyage de Bougainville, chapitre 2, Diderot, 1796, commentaire, analyse. - Les Cours Julien. Nouveau: Mot du jour: écheveau. Les mots à la mode: clash. Le discours du vieillard, supplément au voyage de Bougainville, chapitre 2, Diderot, 1796, commentaire, analyse. Coursjulien août 8, 2014 1.

  14. Supplément au voyage de Bougainville, l\'aumônier : analyse

    Par Amélie Vioux. 13 février 2016. 10 commentaires. Voici l'analyse de l'entretien de l'aumônier et d'Orou issu de la section III de Supplément au voyage de Bougainville de Diderot (1772). L'extrait étudié va de « Ici le véridique aumônier convient que » jusqu'à « et faisaient des vœux sur elle.

  15. Histoire de Polly Baker, Supplément au voyage, Diderot : analyse

    Voici un commentaire de l'histoire de miss Polly Baker issue de la section III du Supplément au voyage de Bougainville de Diderot (1772). L'extrait analysé va de « Une fille, Miss Polly Baker, devenue grosse pour la cinquième fois » jusqu'à « il avait fait une fille publique. »

  16. Supplément au Voyage de Bougainville : Résumé du livre

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    L'aumônier et Orou Supplément au voyage de Bougainville Dans la division que les Taïtiens se firent de l'équipage de Bougainville, l'aumônier devint le partage d'Orou.

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    Diderot, Supplément au voyage de Bougainville, " Les adieux du vieux Tahitien ", 1796 . A consulter, la littérature d'idées. Le mythe du bon sauvage, Diderot, le Supplément au voyage de Bougainville - Autre analyse ; Saint John Perse, commentaires littéraires, "Le mur", Image à Crusoé, et "Vendredi" Éloge. Version du mythe du bon ...

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